Son travail est marqué par l'abstraction, l'expressionnisme et l'expérimentation. Ses matières de prédilection sont le bronze et le bois de différentes essences. Il utilise aussi le tissu. Il réalise un mélange des genres de la sculpture et de l'architecture, qui va de pair avec un goût pour le monumental, notamment dans la seconde moitié de sa vie artistique. Le cycle des XX Demeures interroge les concepts de temps et d’espace.
En 1938, Étienne-Martin épouse l'artiste céramiste Annie Talboutier (1914-1988), qu'il a rencontrée à l'Académie Ranson.
Il s'installe dans son atelier de la rue du Pot-de-Fer, dans le quartier de Mouffetard à Paris[2].
Plusieurs rencontres sont importantes, en particulier celle de Marcel Duchamp en 1936, On peut mentionner encore Léon Reymond, proche de Marcel Duchamp et d'André Breton, initiateur d'artistes tels que Louis Thomas et César Geoffray. Celui-ci l'incite à lire René Guénon et l'ouvre à l'ésotérisme et aux doctrines orientales et extrême-orientales, que l'auteur désigne comme "sciences sacrées". En 1937, la formation d'Étienne-Martin n'est guère freinée par la contrainte du service militaire qu'il effectue à Strasbourg; il lit Breton, Guénon, et d'autres auteurs qu'il mentionne dans ses lettres à Michaud. C'est pour l'artiste le début d'une quête métaphysique, guidée par les textes traditionnels, la symbolique ancienne et le taoïsme, tout en marquant une rupture profonde avec la pensée occidentale[3].
Cette idéologie se manifeste dès 1939 dans l'œuvre Nuit, anciennement appelée Femme assise, créée en 1935. Le thème de la nuit, récurrent dans l'œuvre d'Étienne-Martin, peut être vu comme un mysticisme qui ouvre au rêve, à l'univers suprasensible des doctrines orientales et ésotériques, plus que comme la métaphore du temps de préparation à la guerre.
Durant la guerre, Étienne-Martin est mobilisé comme infirmier. Il est fait prisonnier en Allemagne pendant l'été 1940, il travaille huit mois dans une ferme, il est libéré en 1941[4]. Il se réfugie en 1942 à Oppède avec Stahly et Zelman, dans la communauté animée par l'architecte Bernard Zehrfuss, ils reconstruisirent des villages abandonnés[4]. En 1943-1944, il se trouve à Dieulefit (Drôme) où il se lie avec l'écrivain Henri-Pierre Roché[5]. Il s'installe à Mortagne-au-Perche en Normandie, il sculpte une Pietà en bois de tilleul entre 1944 et 1945[6]. De retour à Paris en 1947 il vit chez Roché qui lui fait rencontrer Brancusi, Dubuffet, Henri Michaux[7]. Il fréquente la communauté de Georges Gurdjieff pendant une dizaine d'années[7].
En 1951, il fait la connaissance de James-Jacques Brown, peintre et sculpteur d'œuvres monumentales, ils vont devenir des amis proches, Etienne Martin va promouvoir l'œuvre de Brown, aidant à le faire connaître.
En 1952, Étienne-Martin conçoit un projet d'église pour le quartier de Bron-Parilly près de Lyon. Jamais réalisée, cette commande qu'il doit à Marcel Michaud, est connue par quelques croquis (Lyon, musée des beaux-arts, Fonds Marcel Michaud) et trois maquettes (collection particulière)[8]. Conçu en pleine querelle de l'art sacré, le projet est contemporain de la construction de la Chapelle Notre-Dame-du-Haut à Ronchamp par Le Corbusier. Étienne-Martin commence en 1954 la série des Demeures qui l'ont rendu célèbre. Ces œuvres à la croisée de la sculpture et de l'architecture font référence à sa maison d'enfance dont il tente de reproduire l'originalité et l'atypisme[6].
Il reçoit en 1966 le Grand Prix international de sculpture à la 33eBiennale de Venise[4].
En 1972, une exposition Étienne-Martin est présentée au Musée Rodin. En 1984, une exposition de l'ensemble de ses Demeures est présentée au Centre Pompidou à Paris. Une exposition lui est consacrée en 1996 à la Fondation de Coubertin (Saint-Rémy-lès-Chevreuse, Yvelines). Une autre lui rend hommage en 1997 au Musée des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand (actuel Musée d'art Roger-Quilliot). En 2010 (juin à septembre), une exposition est présentée au Centre Pompidou[9], hommage rendu à l'artiste à travers la présentation d'un ensemble de quinze sculptures, des dessins, des carnets personnels et des photographies de son atelier. Elle est ensuite montrée à Vannes au musée de la Cohue (juin 2011 - septembre 2011) dans le cadre du programme « Centre Georges Pompidou hors-les-murs ». D'octobre 2011 à janvier 2012, la première rétrospective de l'artiste est présentée lors d'une exposition au musée des Beaux-Arts de Lyon[10].
Il meurt le à Paris 13e, et est inhumé dans la 13e division du cimetière du Père-Lachaise (13e division), quelques jours avant l'inauguration de sa dernière œuvre, une commande de l'État et de la Ville de Paris, destinée au parvis de la Bibliothèque nationale[7]
Sa seconde épouse, née Marie-Thérèse Le Balch en 1915, est morte le 24 juin 2014 à Ivry-sur-Seine.
↑ a et bClaire Barbillon, Sculptures du XVIIe au XXe siècle : musée des beaux-arts de Lyon, Paris/Lyon/impr. en République tchèque, Somogy éditions d'art / Musée des beaux-arts de Lyon, 592 p. (ISBN978-2-7572-1269-1 et 2757212699, OCLC1007810976), p. 450.
↑Jean-Christophe Stuccilli, « Étienne Martin architecte. À propos du projet de l'église de la Trinité de Bron-Parilly », Sculptures, no 1, septembre 2014, p. 57-65, (ISBN9791024001852)
Groupe Témoignage, 1936-1943, Musée des Beaux-Arts, Lyon, 1976.
Les Demeures, Centre Pompidou, 1984 (98 p.) (ISBN2858502471) .
Marcel Michaud, Lyon, 1933-1958, Stylclair, Groupe Témoignage, Galerie Folklore, texte de Bernard Gavoty, Espace Lyonnais d'Art Contemporain, Lyon, 1989 (76 p.) (ISBN2906709271)
Étienne-Martin, la donation L'Oréal, musée d'art moderne de la Ville de Paris, exposition permanente. Auteurs : Gérard Audinet, Sabrina Dubbeld, Claire Maingon, Paul-Louis Rinuy, 2008.
Montparnasse années 30 - Bissière, Le Moal, Manessier, Étienne-Martin, Stahly… Éclosions à l’Académie Ranson, Rambouillet, Palais du roi de Rome, Éditions Snoeck, 2010 (ISBN978-90-5349-796-8). Auteurs : Alexandra Charvier, Sabrina Dubbeld, Lydia Harambourg, Claire Maingon, Scarlett Reliquet
Étienne-Martin, la collection du musée national d'art moderne, Paris, centre Georges Pompidou, 23 juin 2010 - 13 septembre 2010. Auteurs (par ordre alphabétique) : Jean-Paul Ameline, Sabrina Dubbeld, Fabien Faure, Doïna Lemny.
L'Atelier d'Étienne-Martin, 22 octobre 2011 - 23 janvier 2012, sous la direction de Sylvie Ramond et de Pierre Wat, Lyon, musée des Beaux-Arts, Paris, Éd. Hazan, 2011, 304 p. Auteurs (par ordre alphabétique) : Jacques Beauffet, Sabrina Dubbeld [1]
Le Poids du monde. Marcel Michaud (1898-1958), sous la direction de Laurence Berthon, Sylvie Ramond et de Jean-Christophe Stuccilli (dir.), Lyon, musée des Beaux-Arts, 22 octobre 2011-23 janvier 2012, Lyon, Éd. Fages, 2011, 320 p. (ISBN9782849752517) [2]
Articles
François-René Martin, « Chasuble, maison, armure, pelure, peau ? Sur les usages et les significations du Manteau d'Étienne Martin architecte », Sculptures, no 1, septembre 2014, p. 19-25 (ISBN9791024001852)
Jean-Christophe Stuccilli, « Étienne Martin architecte. À propos du projet de l'église de la Trinité de Bron-Parilly », Sculptures, no 1, septembre 2014, p. 57-65 (ISBN9791024001852)
Ionel Jianou, Gérard Xuriguera, Aube Lardera, La Sculpture moderne en France, Paris, Arted Éditions d'Art, 1982.
Alain Vollerin, Le groupe témoignage de Lyon, 1936-1940, Lyon, Editions Mémoire des Arts, coll. « Groupes et mouvements », , 116 p. (ISBN978-2-912544-16-2, OCLC48870554).
Mémoires universitaires inédits
Sabrina Dubbeld, Penser / Classer : le cas du sculpteur français Étienne-Martin, mémoire de master I en histoire de l'art contemporain à l'université Paris-Nanterre sous la direction de Thierry Dufrêne, 2008, 766 p.
Sabrina Dubbeld, Étienne-Martin : un sculpteur parmi les architectes (aux côtés de Bernard Zehrfuss, Jean Le Couteur, François Stahly, etc.), mémoire de master II en histoire de l'art contemporain à l'université Paris-Nanterre sous la direction de Thierry Dufrêne, 2009, 1271 p.
Stéphanie Jamet, Le thème de la Nuit dans l'œuvre d'Étienne-Martin, mémoire maîtrise d'histoire de l'art contemporain à l'université Paris-Sorbonne sous la direction de Serge Lemoine, 1995
Filmographie
Étienne-Martin, entretien avec René Deroudille, Mémoire des Arts, Lyon, 1988 (45 minutes).
Étienne-Martin, entretien avec Michel Ragon, Mémoire des Arts, Lyon, 1994 (40,30 minutes).