En grec ancien, alpha est prononcé [a] quand il est court et [aː] quand il est long. En cas d'ambiguïté, la lettre est de nos jours parfois diacritée d'un macron ou d'une brève : Ᾱᾱ, Ᾰᾰ.
Dans le dialecte attique-ionien du grec ancien, l'alpha long /aː/ se transforme en /ɛː/ (êta). En ionien, cette transformation s'effectue dans tous les cas. En attique, elle ne se produit pas après epsilon, iota et rhô (ε, ι, ρ ; e, i, r). En dorien et éolien, l'alpha long est toujours préservé[1] :
La lettre alpha tire probablement son origine de l'alphabet linéaire protosinaïtique, un alphabet utilisé dans le Sinaï il y a plus de 3 500 ans, lui-même dérivé des hiéroglyphes égyptiens ; le son, [ʔ] (coup de glotte), est alors représenté par une tête de bœuf stylisée. La première lettre de l'alphabet phénicien, souvent nommée aleph (ʾālef) par analogie avec l'alphabet hébreu, est une consonne (l'alphabet phénicien est un abjad qui ne note pas les voyelles) correspondant non pas au son [a] mais au coup de glotte [ʔ]. Elle signifie également « tête de bœuf » et son écriture provient d'une stylisation du caractère proto-sinaïtique.
L'alphabet grec est créé sur le modèle de l'alphabet phénicien. Le grec ancien n'utilise pas le coup de glotte et son alphabet transcrit les voyelles : la première lettre de l'alphabet phénicien est donc utilisée par l'alphabet grec pour noter le son [a]. Sur les premières inscriptions grecques après les siècles obscurs, vers le VIIIe siècle av. J.-C., l'orientation de la lettre correspond à celle de l'alphabet phénicien. Dans les alphabets grecs ultérieurs, elle subit généralement une rotation de 90° et ressemble à la forme majuscule moderne. Les différents alphabets grecs archaïques utilisent toutefois des variétés locales qui peuvent être distinguées par le raccourcissement d'une jambe ou par l'angle des lignes[2] : (Corinthe, Égine, Sicyone), (Cnide, Ionie, Milos, Rhodes, Santorin), (Achaïe, Arcadie, Attique, Corinthe, Crète, Délos, Ithaque, Mégare, Naxos, Paros), (Argos, Eubée, Laconie, Thessalie, Tirynthe), (Achaïe, Béotie), etc.
La forme actuelle de la lettre provient de l'alphabet utilisé en Ionie, qui est progressivement adopté par le reste du monde grec antique (Athènes passe un décret formel pour son adoption officielle en 403 av. J.-C. ; son usage est commun dans les cités grecques avant le milieu du IVe siècle av. J.-C.).
En grec, « alpha » provient de la prononciation sémitique ancienne (qu'on ne peut reconstituer avec précision) et ne signifie rien, ainsi qu'il en est des autres lettres (béta, gamma, delta, etc.). En grec ancien, la lettre est appelée ἄλφα (álpha, prononcée /ˈal.pʰa/) ; en grec moderne, elle est appelée άλφα (álfa, prononcée /ˈal.fa/).
La lettre alpha est transmise à l'alphabet latin par l'intermédiaire de l'alphabet étrusque, lui-même dérivé de l'alphabet grec « rouge » employé en Eubée — alphabet que les Étrusques apprennent à Pithécusses (Ischia), près de Cumes. En passant dans l'alphabet latin, les lettres ayant perdu leur nom pour se réduire le plus souvent à leur son, l'alpha grec est rebaptisé a. L'alpha latin Ɑ, utilisé dans certaines langues camerounaises, est basé sur la lettre grecque minuscule. Dans l'alphabet cyrillique, l'alpha donne naissance à la lettre А.