Orgue de cinémaL'orgue de théâtre ou orgue de cinéma est un instrument de musique de la famille des orgues à tuyaux, largement développé à partir de la fin du XIXe siècle que l'on trouvait et que l'on peut encore trouver dans les théâtres et les grandes salles de cinéma pour accompagner les films muets, mais aussi la danse, la chanson, la musique d'ambiance pendant les entractes et autres manifestations sociales ou sportives, le divertissement et le concert. Il n'est pas synonyme d'orgue de variété, ce dernier étant généralement électronique et pourvu d'une section rythmique automatique. Sur l'orgue de théâtre, l'organiste doit tout faire avec ses mains et ses pieds. L'origine de cet instrument est le « orchestral organ » de Robert Hope-Jones conçu vers 1890. Le but était d'imiter les timbres des instruments d'orchestre, aligner le son de l'orgue sur ce dernier. On y trouve donc le témoignage d'un concept d'orgue très différent de l'orgue d'église et de concert classique. Caractéristiques de l'orgue de théâtreUtilisé pour jouer principalement de la musique de divertissement ou de variétés, il se distingue de l'orgue d'église, ainsi que de l'orgue électronique Hammond, car pneumatique, mais en étant presque le précurseur au cours des années 1930 avant l'invention par la suite de ce dernier, en parallèle à la même époque des orgues de salon. Il est souvent aussi imposant de par sa taille qu'un orgue d'église pour sonoriser les grandes salles, possédant lui aussi plusieurs claviers, le même genre de pédalier à deux octaves pour les basses, ainsi qu'une pédale d'expression pour le volume, mais les sonorités et registres entièrement mécaniques pouvant actionner toutes sortes d'instruments internes tel que xylophone ou cloches tubulaires (comme c'est aussi le cas de plusieurs instruments de musique mécanique), sont obtenus par leviers à bascule et non manettes à tirettes, à l'analogue cette fois d'un orgue électronique.
RépertoireL'orgue de théâtre est avant tout un instrument cherchant à imiter l'orchestre. On y joue donc le répertoire qui lui est propre, essentiellement improvisé : variété, cinéma, beaucoup de transcriptions et du jazz. Du fait de sa ressemblance timbrale avec l'orgue romantique, il n'est pas interdit d'y jouer Franck ou Vierne, à la rigueur Widor. L'on peut aussi tout à fait s'essayer à interpréter Lefébure-Wely. Le célèbre Virgil Fox y a même osé du Bach. ConsoleLa console typique de l'orgue de théâtre en forme de fer à cheval (horse shoe), souvent décorée avec des moulures dorées style rococo, boîte à bonbon lumineuse… La sobriété est interdite. L'appel des jeux se fait dans tous les cas avec des langues de chat et un indispensable combinateur. Chaque langue de chat est réalisée dans une couleur propre à la famille de jeux (fonds, anches, strings, percussions) et possède un signe distinctif (un point de couleur généralement) qui indique dans quelle chambre est situé le jeu (Main, Solo...) ainsi un diaphone de solo est différencié d'un diaphone de Main. C'est important pour que l'organiste utilise la bonne pédale d'expression pour faire varier ses jeux. Les trémolos sont repérés pour chaque rang: Tibia tremolo, clarinet tremolo, vox tremolo... La console de l'orgue de cinéma est souvent doté d'un second siège, le Howard-Seat (La chaise Howard), qui permet au public de suivre plus aisément le jeu des pieds. Cette console est placée fréquemment sur un podium placé sous la scène. La console montée sur la scène alors que l'organiste joue est un effet courant. ConstructionL'apogée de l'orgue de théâtre se situe dans la première moitié du XXe siècle. C'est l'époque où l'on maîtrise bien la traction électro-pneumatique ce qui a été l'élément déterminant pour favoriser l'inventivité et l'imagination des facteurs. Un des fondements de cet orgue est que l'on parle en rangs et non plus en jeux : un rang permet d'avoir plusieurs registres selon le système unit. On a donc beaucoup moins de rangs réels que de jeux disponibles à la console. Par exemple, l'étagement harmonique des Tibias ou Tibias clausa peut n'être qu'une série de reprises sur un seul rang pouvant compter jusqu'à 105 tuyaux et couvrant ainsi toute la tessiture du 16 au 1 pied. Il en est de même pour les anches qui, en ravalant simplement de 12 tuyaux dans le grave et dans l'aigu, peuvent ainsi être déclinés en 16, 8 et 4 pieds. Le style musical de l'orgue de théâtre n'est pas affecté par ces reprises puisqu'on y fait plus entendre de la musique homophonique que polyphonique. La forme des pièces les plus typique consiste en une pompe (basse et accompagnement main gauche) qui soutient une mélodie (main droite). Il n'y a théoriquement aucune doublure d'octave qui pourrait faire entendre les « trous ». Les improvisateurs prennent en compte cette caractéristique lorsqu'ils développent d'autres formes (mélodie à la main gauche par exemple). Claviers particuliersTrès souvent, on trouve au moins un clavier équipé du Second Touch (double enfoncement permettant un renforcement de registration par l'ajout d'un ou plusieurs jeux, suivant que l'on joue avec un appui normal ou un appui plus fort). Il s'agit d'un système électro-mécanique très ingénieux que l'on retrouvera par la suite dans les claviers modernes des synthétiseurs sous le nom d'« after touch ». Il permet donc soit un sforzando sur une / des notes déjà jouées, soit un jeu plus fort en actionnant directement la second touch. Par ailleurs, la construction des claviers permet des effets plus courants sur ce type d'orgue comme les glissandi. Un orgue de cinema est généralement constitué de la manière suivante ...2 chambres expressives (l'une dite accompagnement, l'autre solo) avec la disposition suivante : Section Accompagnement :
Section Solo :
La pédale reprend généralement les basses 16-8 des divers rangs, et permet d'actionner des percussions telles que tambours, grosse caisse ou cymbale. L'orgue de cinéma a de deux à cinq claviers et de deux (!) à plusieurs dizaines de rangs (voire 70 rangs). Les petits orgues de cinéma commencent cependant avec environ 6 rang. Parenté et filiationL'orgue de cinéma ne fut pas construit systématiquement dans les cinémas muets. Le piano y était probablement plus souvent l'instrument de prédilection. Un instrument à cheval entre ces deux instruments fut le Photoplayer, piano automatique pourvu de deux mécaniques à rouleaux qui permettait de changer l'un d'eux pendant que l'autre jouait. Ce dernier était pourvu d'effets comme cloches, tambours et sirènes qu'il fallait le plus souvent activer à la main. Dès les années 1930 nait un parent dont le son se rapproche beaucoup, au moins la parenté entre les tibias et le son de l'orgue Hammond est assez évidente. L'orgue de variétés (à pédalier court et claviers réduits et décalés) fut une variante électronique dans les années 60 et 70, Wurlitzer le produisant aussi. Quelques fabricants d'orgues numériques produisent quelques modèles d'orgue de cinéma ; enfin, l'ordinateur permet la production d'orgues virtuels dédiés à l'orgue de cinéma comme le Miditzer. Quelques organistes et orguesAngleterreL'Angleterre est prépondérante en tant que détentrice d'orgues de cinéma et nombre de ses artistes musiciens. Parmi les principaux figurent en tête d'affiche, ayant effectué par ailleurs de nombreux disques, voire vidéos et concerts[3] : Sur l'orgue Wurlitzer de la salle de bal de la Tour de Blackpool
Sur divers orgues de cinéma
FranceLes orgues de cinéma étaient assez nombreux en France au début du XXe siècle, mais à la suite de l'apparition du cinéma parlant, voire de l'orgue électronique Hammond puis du synthétiseur, ils furent souvent considérés ensuite comme obsolètes, mais certains conservés en étant revendus notamment en Angleterre.
États-UnisLe Chicago Stadium possédait l'orgue le plus grand en Amérique du Nord, pour son époque. Un Barton, de la société Bartola Musical Instrument Company (en), qui aurait pu égaler, dit-on, le volume de 25 fanfares. L'orgue était installé dans le plafond central, et avait 52 rangs de tuyaux de grande taille ainsi que la percussion et les effets habituels. La console « circus wagon », rouge et or, peut-être la console la plus grande jamais construite, était exposée bien en vue sur le balcon de l'arène, et se composait de six claviers, ainsi que de plus de 800 clés d'arrêt. L'orgue était alimenté par une immense soufflerie Spencer de 100 CV, et le son de l'orgue, selon les mots de Marcel Dupré, lors du récital dédicatoire en 1929, était immense : « ... Ce fut comme si le plus ardent amoureux de chocolat était jeté dans une piscine remplie de chocolat ... ». Al Melgard (en) était le troisième et le plus connu des titulaires[4]. En 1932, Franklin Roosevelt a été nommé à l'investiture pour les élections présidentielles ; Melgard joue Happy Days Are Here Again, et cet air devient la chanson de campagne de FDR. Melgard était sans doute le meilleur organiste de l'arène sportive pour faire correspondre des chansons à des événements, au cours des matchs, et sa cible favorite était l'arbitre. Lorsque King Clancy, ancienne gloire de la NHL, sifflait un pénalty, Melgard jouait Clancy Lowered the Boom. À la fin des années 1950, il a décidé de saluer l'arbitre et les juges de ligne quand ils arrivaient sur la glace avant le début du jeu avec Three Blind Mice. Cette pratique a pris fin rapidement après un ordre laconique du président de la LNH, Clarence Campbell. My Vision était la dernière chanson jouée après chaque match des Blackhawks au Stade. Elle a été composée par Al pour Sonja Henie dans le cadre de la revue Hollywood Ice d'Arthur Wirtz. La performance la plus notable de Melgard aurait été lors d'un match de boxe, au Stadium, dans les années 1940. Le match pris fin avec une décision extrêmement impopulaire. La foule est devenue indisciplinée et une émeute a éclaté à l'étage avec des chaises pliantes qui volaient. Melgard aurait tenté de calmer le tumulte avec un chant religieux, ou L'Orage, puis joué The Star Spangled Banner. Comme cela ne fonctionnait pas, Melgard aurait ouvert la plupart des 800 clés sur l'immense orgue Barton, positionné la pédale de volume à fond, et posé ses mains à plat sur les claviers. Le son aurait soufflé un grand nombre d'ampoules et des fenêtres. Stupéfaits, les fans auraient arrêté de se battre, ramassé leurs chapeaux et leurs manteaux, et sont sortis du bâtiment. Lors d'un match de catch, avec "Gorgeous" George, sur le ring saupoudrant ses cheveux. Melgard joue Oh, You Beautiful Doll[5]. L'orgue a été retiré du stade et stocké avant que le bâtiment ne soit démoli. Malheureusement , une grande partie de l'orgue a été détruit dans l'incendie de l’entrepôt, en octobre 1996 mais l'énorme console, unique en son genre, qui avait été stockée ailleurs, a été sauvée et est maintenant dans une collection privée dans le Nevada. SuisseGuy Bovet, Nicolas Hafner et Vincent Thévenaz ont joué sur l’orgue Wurlitzer de 1937, installé au collège Claparède de Genève en 1982[6]. Un des derniers orgues de cinéma de Suisse encore en activité s'y trouve et une fois par année s'y déroule le festival de cinéma "l'orgue fait son cinéma"[7]. Un autre orgue de cinéma se trouve au café-Théâtre Barnabé de Servion[8], la salle est équipée depuis 1998 du plus grand orgue de cinéma théâtre d’Europe et le plus grand orgue symphonique de Suisse avec 150 jeux[réf. souhaitée]. Artistes diversJohn Atwell - Charlie Balogh - Knight Barnett - Dan Bellomy - Jesse Crawford - Ken Double - Jelani Eddington - Tony Fenelon - Paul Fitzgerald - Virgil Fox - John Giacchi - Simon Gledhill - Ryan Heggie - Dennis James - Neil Jensen - David Johnston - Jean-Philippe Le Trévou - Lance Luce - Kylie Mallett - Chris Mcphee - Jonas Nordwall - Chris Powell - Jim Riggs - Rosa Rio - Patti Simon - Walt Strony - Ray Thornley - Brett Valliant - Lew Williams - Clark Wilson - Nigel Ogden - Rob Richards - Quentin Maclean. Quelques artistes, comme Virgil Fox, Quentin Maclean, Jack Moelmann, Dr Carol Williams, Bernard Dargassies et Richard Hills se sont adonnés aux différents répertoires d'orgues, tels que l'orgue classique d'église et l'orgue de variétés de cinéma, ainsi que l'orgue électronique. Marcel Dupré, Pierre Cochereau et Jean Guillou ont donné des concerts sur de tels instruments lors de leurs tournées aux États-Unis. Facteurs et marques
DisquesPierre-Marcel Ondher a fait paraître récemment un double CD de différents artistes, dont notamment Reginald Dixon (en) et Sidney Torch. Notes
Articles connexes
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