Le pentecôtisme a ses origines dans le mouvement de sanctification (Holiness Movement, vers une perfection chrétienne), mouvement qui s'est développé dans la seconde moitié du XIXe siècle dans le terreau méthodiste sous l'impulsion de prédicateurs revivalistes itinérants et des camp meetings, vastes rassemblements en plein air où des foules réunies plusieurs jours durant écoutaient des prédications, chantaient et exprimaient toute leur ferveur religieuse. Dans la ligne de la théologie de John Wesley (1703-1791), ce mouvement insistait sur la conversion mais aussi sur la sanctification, c'est-à-dire sur la nécessité pour le croyant de mener une vie exemplaire réellement transformée par la foi[1]. Cette sanctification est considérée comme une seconde bénédiction qui vient après la conversion[1].
Le pentecôtisme est introduit en Europe par le pasteurnorvégienméthodiste d'origine anglaise Thomas Ball Barratt (1862-1940) qui fait l'expérience du baptême du Saint-Esprit à New York en 1906[1], expérience doublée d'un épisode de glossolalie, puis il revient en Norvège où il fonde une communauté pentecôtiste qui aura une influence sur les pays voisins : Suède, et Angleterre notamment. Il voyagera dans différents pays pour l’évangélisation : Inde, Suède Finlande, Pologne, Estonie, Danemark et Islande[6].
À partir de 1911, de nombreux ministres blancs affiliés à l’Église de Dieu en Christ ont manifesté leur insatisfaction de la direction afro-américaine[11]. En 1913, 353 ministres blancs ont formé une nouvelle Église, qui donnait ses propres accréditations, bien qu’utilisant toujours le même nom (Église de Dieu en Christ). En , des dirigeants pentecôtistes de différentes confessions, dont le pasteur E.N. Bell de la mission de la Foi Apostolique, ont appelé les assemblées de l’Église de Dieu en Christ ainsi que les assemblées de foi pentecôtistes et apostoliques à s'unir pour coopérer dans la mission. Environ 300 pasteurs et laïcs venant de 20 États et de pays étrangers se sont ainsi rencontrés lors d'une Assemblée Générale à Hot Springs (Arkansas), aux États-Unis[12],[13],[14]. La communauté restante qui a émergé de la réunion a constitué la Conférence générale des Assemblées de Dieu aux États-Unis (General Council of the Assemblies of God in the United States of America).
Les Églises pentecôtistes se sont développées en France avec les prédications de l’évangéliste pentecôtiste anglais Douglas Scott et du pasteur danois Owe Falg qui ont commencé en 1930[24]. Les Assemblées de Dieu de France sont ainsi fondée en 1932[25]. En 1947, elle en compte 60[26]. L’Institut de théologie biblique à Léognan a été fondé en 1968[27]. En 2004, elle comptait 40 000 membres et 395 églises[28].
L'expansion contemporaine
Les missions américaines et européennes pentecôtistes sont nombreuses, mais le pentecôtisme va surtout se développer de façon autonome dans diverses régions du monde, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie[29].
Une des caractéristiques distinctives du pentecôtisme est l'importance donnée au Saint-Esprit[32]. Selon les pentecôtistes, le Saint-Esprit vient habiter en tous ceux qui sont véritablement sauvés et travaille à travers eux de manière visible[33],[34]. Ce baptême vient souvent après celui de l'eau mais peut parfois arriver en même temps que celui-ci, voire le précéder. Les pentecôtistes croient que le baptême du Saint-Esprit est toujours accompagné au départ par la manifestation extérieure du parler en langues[35],[36],[37]. Les pentecôtistes insistent également sur les divers dons du Saint-Esprit (prophétie, guérison, parler en langues), considérés comme manifestation spirituelle et continue de Dieu dans l’histoire humaine et dans les histoires des vies humaines, et grâces surnaturelles nécessaires à chaque chrétien afin qu'il œuvre à la mission de l'Église[38].
Salut
À l'origine, conformément à la théologie du Mouvement de sanctification, les pentecôtistes distinguaient trois étapes dans la voie du salut : la conversion également appelée régénération, la sanctification considérée comme une seconde bénédiction et le baptême du Saint-Esprit attesté par le parler en langues, considéré comme une troisième bénédiction[39],[1]. Mais au fil des années, la plupart ont accepté deux étapes : la conversion-sanctification d'une part et le baptême du Saint-Esprit d'autre part[1],[40],[41].
Sexualité
La majorité des associations pentecôtistes du monde croient uniquement à la sexualité dans le mariage entre un homme et une femme [42].
La gouvernance dans les églises pentecôtistes est majoritairement congrégationaliste[51]. Elle est de type épiscopalien dans certaines confessionschrétiennes pentecôtistes[51]. Dans un certain nombre de communautés, l'église est dirigée par un conseil d’anciens[52]. De nombreuses églises sont également affiliées à des confessionschrétiennes pentecôtistes et sont ainsi redevables à l’organisation pour certains règlements, malgré l’autonomie de l’église[53].
Culte
Le service pentecôtiste est de type évangélique et comprend ainsi la louange, l’adoration, des prières à Dieu, et un sermon fondé sur la Bible, et périodiquement la Sainte-Cène[54]. Dans beaucoup d'églises, il y a des classes adaptées pour les enfants, voire pour les adolescents[55]. Des réunions de prière ont également lieu en semaine[56].
Lieux de culte
Les lieux de cultes sont généralement appelés "temples" ou simplement "bâtiment (d'église)"[57],[58],[59],[60]. Dans certaines megachurches, on parle de "campus"[61],[62].
Parmi les recensements effectués par les confessionschrétiennes pentecôtistes publiés en 2020, celles qui revendiquaient le plus de membres étaient sur chaque continent :
Divers groupes chrétiens ont reproché au mouvement pentecôtiste et charismatique, la trop grande attention aux manifestations mystiques, comme la glossolalie qui serait le signe obligatoire d’un baptême du Saint-Esprit pour un croyant, les chutes au sol, les gémissements et cris, lors des services, ainsi que son anti-intellectualisme[75].
La théologie de la prospérité, qui s’est répandue dans les années 1970 et 1980 aux États-Unis, principalement par des télévangélistes pentecôtistes et charismatiques, est une doctrine particulièrement controversée dans les églises évangéliques[76],[77]. Elle est centrée sur l’enseignement de la foi chrétienne comme un moyen de s’enrichir financièrement et matériellement, par une « confession positive » et une contribution aux ministères chrétiens[78]. Certains pasteurs menacent de malédictions, d’attaques du diable et de pauvreté ceux qui ne donnent pas la dîme[79],[80]. Les offrandes et la dîme occupent ainsi beaucoup de temps dans certains cultes[81]. Les collectes d’offrandes sont multiples ou séparées dans divers paniers ou enveloppes afin de stimuler les contributions des fidèles [82],[81]. Souvent associée avec la dîme obligatoire, cette doctrine a été comparée à un business religieux[83],[84],[85]. Les pasteurs qui adhérent à la théologie de la prospérité ont été critiqués par des journalistes pour leur style de vie bling-bling (vêtements luxueux, grandes maisons, voitures haut de gamme, avion privé, etc.)[86],[85],[87]. En 2012, le Conseil national des évangéliques de France a publié un document dénonçant cette doctrine, en mentionnant que la prospérité était bien possible pour un croyant, mais que cette théologie poussée à l'extrême amène au matérialisme et à l’idolâtrie, ce qui n'est pas le but de l’Évangile[88],[89].
Des dérives ont accompagné l’enseignement de la guérison par la foi. Dans certaines églises pentecôtistes, des tarifications de prière contre des promesses de guérison ont été constatées[90]. Certains pasteurs et des évangélistes ont été accusés d’avoir mise en scène de fausses guérisons[91],[92]. Certaines églises, aux États-Unis ou au Nigeria, ont déconseillé à leurs membres la vaccination ou la médecine, en déclarant que cela était pour les faibles dans la foi et qu’avec une confession positive, ils seraient immunisés [93],[94]. Des églises pentecôtistes qui interdisent le recours à la médecine ont causé des décès qui auraient pu être évités, entrainant parfois la condamnation de parents à des peines de prison pour la mort de leurs enfants [95],[96]. Cette position n’est pas représentative de toutes les églises évangéliques, comme l’indique le document La Guérison miraculeuse publié en 2015 par le Conseil national des évangéliques de France, qui mentionne que la médecine est l’un des dons de Dieu faits aux humains[97],[98]. Des églises et certaines organisations humanitaires chrétiennes évangéliques sont également impliquées dans des programmes médicaux de santé[99],[100],[101].
Selon le rapport 2016-2017 de la Miviludes, en France, le deuxième mouvement religieux qui comptait le plus de signalements pour de présumées dérives sectaires était le christianisme évangélique, et majoritairement dans le courant pentecôtiste pour des églises non membres du Conseil national des évangéliques de France[102],[103].
↑Les auteurs ou organisations pentecôtistes annoncent parfois des chiffres très supérieurs. Ainsi, selon Matthew Clarke, leur nombre « s'approche des 500 millions en 1997 » (voir:(en) Matthew Clarke, Handbook of Research on Development and Religion, UK, Edward Elgar Publishing, , p. 171). Pour arriver à des chiffres comparables dans l'étude du Pew Research Center, il faut ajouter les effectifs des églises pentecôtistes et les charismatiques alors que ces derniers n'appartiennent pas à des églises pentecôtistes, ainsi que le Pew Research Center le précise clairement. Voir (en) « Christian Movements and Denominations », sur pewforum.org, (consulté le )
↑Selon certaines publications pentecôtistes, le nombre de pentecôtistes serait passé de 459 millions en 2005 à 628 millions de pentecôtistes dans le monde en . Voir : International Bulletin of Missionary Research (volume 37, no 1), janvier 2013, p. 32-33.
Références
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