Révisions constitutionnelles sous la Cinquième République
Les révisions constitutionnelles sous la Cinquième République consistent en vingt-cinq modifications de la Constitution française du . Survenues à partir des premières années de mise en place du régime, elles sont plus nombreuses dans les années 1990 et 2000, du fait d’une volonté de moderniser les institutions d’une part, de construire l’Union européenne et de s’intégrer à l’ordre juridique international de l’autre.
À la suite des vingt-cinq révisions survenues entre 1960 et 2024, seuls 30 articles sur les 92 originaux demeurent inchangés[1], et le texte constitutionnel compte alors 108 articles. Il diffère donc sensiblement de celui de 1958 ; les évolutions les plus notables sur le fond portant sur la modalité de l'élection du président de la République, l’instauration du quinquennat, le renforcement des prérogatives du Conseil constitutionnel et l’affirmation des collectivités territoriales et de l’Union européenne.
Le projet ou la proposition de révision doit être [...] voté par les deux assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum.
Toutefois, le projet de révision n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès ; dans ce cas, le projet de révision n’est approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. [...]
Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire.
La forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l’objet d'une révision. »
Dans sa rédaction actuelle, les articles 89 et 42 précisent que « la discussion en séance des projets de révision constitutionnelle … porte, en première lecture devant la première assemblée saisie, sur le texte présenté par le Gouvernement et, pour les autres lectures, sur le texte transmis par l’autre assemblée » (et non sur le texte adopté en commission comme pour les lois ordinaires). De plus, « [l]a discussion en séance, en première lecture, d’un projet ou d’une proposition de loi ne peut intervenir, devant la première assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de six semaines après son dépôt. Elle ne peut intervenir, devant la seconde assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de quatre semaines à compter de sa transmission ».
Le détail de procédure
L'article 89 prévoit deux situations
Initiative
Discussion et adoption
Approbation
Président de la République sur proposition du Premier ministre
Vote par les deux assemblées en termes identiques
Congrès ou référendum
Membres du Parlement
Vote par les deux assemblées en termes identiques
Référendum
À la différence de la situation en matière d'initiative législative, le Gouvernement ne peut déposer un projet de loi de révision constitutionnelle sans l'accord du président de la République. Le Conseil d’État s’assure que le projet ne place pas la France en contradiction avec ses engagements internationaux, il vérifie que les mesures envisagées sont de niveau constitutionnel et signale qu’une disposition contreviendrait à l’esprit des institutions, porterait atteinte à leur équilibre ou méconnaîtrait une tradition républicaine constante[2].
Par la suite, les deux chambres doivent adopter le projet ou la proposition de loi de révision constitutionnelle dans les mêmes termes. De ce fait, la procédure prévue au dernier alinéa de l'article 45 de la Constitution qui permet de donner le dernier mot à l'Assemblée nationale en cas de désaccord ne s'applique pas. Le Sénat dispose donc d'une forme de droit de veto à l'encontre des révisions constitutionnelles. Il en a fait application en 1984 notamment. Une fois que le projet ou la proposition de loi de révision constitutionnelle a été adoptée par les deux chambres, le président de la République dispose de trois choix. Il peut abandonner la révision, la soumettre à référendum ou la présenter devant le Congrès. À l'origine, le recours au référendum devait être la procédure de droit commun mais elle n'a été utilisée qu'à une seule reprise en 2000. Enfin, devant le Congrès, l'exigence d'une majorité des 3/5 est assez exigeante. En raison de toutes ces conditions, une révision constitutionnelle ne peut être adoptée que si elle suscite un accord de la part des différentes autorités politiques, que ce soit le chef de l'État, le Parlement, le Gouvernement et, dans certains cas, les citoyens.
La question des limites du pouvoir constituant
Les deux derniers alinéas posent une limite aux possibilités de révision constitutionnelle. Toutefois, leur respect dépend uniquement de la volonté des pouvoirs en place de ne pas les remettre en cause. En effet, si le Conseil constitutionnel a reconnu l'existence de ces limites dans sa décision no 92-312 DC[DC 1], il se déclare incompétent pour statuer sur leur respect par une révision constitutionnelle, depuis sa décision no 2003-469 DC du [DC 2]. En la matière, des parlementaires remettaient en cause la mise en place de la décentralisation par la révision du en ce qu'elle porterait atteinte à la forme républicaine du Gouvernement. Cette décision du Conseil constitutionnel a pu être considérée comme trop abrupte. Il aurait été admissible que le juge constitutionnel se contente de contrôler la procédure de révision constitutionnelle[3]. Toutefois, un contrôle trop poussé du Conseil constitutionnel sur une révision constitutionnelle aurait pu être considéré comme une forme de « coup d'état du juge constitutionnel » selon les termes de Jean-Éric Schoettl. Pour sa part, le doyen Vedel estime que le pouvoir constituant est souverain et qu'il ne peut lui être fixé de limites[4].
De ce fait, ces deux alinéas ne font l'objet d'aucune procédure permettant d'en assurer le respect, sans compter qu'il serait possible de réviser la Constitution de manière à les supprimer. Enfin, il convient de préciser que le sens exact de l'expression « forme républicaine du Gouvernement » est sujette à débat. En effet, au sens strict, elle implique que la monarchie ne peut être rétablie mais elle peut être interprétée plus largement pour englober certains principes fondamentaux de la République française[5].
Deux autres limites existent en matière de révision constitutionnelle. Conformément à l'article 7 de la Constitution, en cas de vacance de la présidence de la République, il ne peut être procédé à une révision de la Constitution. Il en est de même en cas de mise en œuvre des pouvoirs spéciaux du président de la République prévue par l'article 16 de la Constitution.
Autres modes de révisions
Depuis le début de la Cinquième République, des révisions ont été adoptées sans utiliser l’article 89.
La loi constitutionnelle du a été adoptée par un vote parlementaire selon l’ancien article 85 de la Constitution, qui faisait intervenir le Sénat de la Communauté.
La loi constitutionnelle du a été adoptée, hors de toute procédure parlementaire, par la voie de l’article 11 de la Constitution et du référendum du 28 octobre 1962. L’utilisation de cette procédure pour réviser la Constitution a été vivement critiquée, étant donné que dans le texte l’article ne prévoit pas explicitement qu’il puisse être utilisé pour réviser la Constitution. L'Assemblée nationale a réagi en adoptant la seule motion de censure de la Cinquième République le . Toutefois, le Conseil constitutionnel, dans sa décision no 62-20 DC du relative à l'élection du président de la République, a décliné sa compétence étant donné que le référendum est une expression directe de la souveraineté nationale et qu'il n'est pas habilité par l'article 61 de la Constitution à juger des lois votées par un tel biais[DC 3]. Cette procédure a aussi été mise en œuvre lors du référendum français sur la réforme du Sénat et la régionalisation de 1969 mais elle n'a pas été menée à son terme en raison de la victoire du non[6]. Si certaines personnalités politiques comme François Mitterrand[6] ou Ségolène Royal ont admis la validité de cette procédure de révision, le Conseil d'État a pris position dans son arrêt Sarran et Levacher du . En effet, en indiquant « Considérant qu'il ressort de ces dispositions que seuls les référendums par lesquels le peuple français exerce sa souveraineté, soit en matière législative dans les cas prévus par l'article 11 de la Constitution, soit en matière constitutionnelle comme le prévoit l'article 89, sont soumis au contrôle du Conseil constitutionnel », il semble restreindre les référendums de l'article 11 aux seules modifications législatives et non à des révisions constitutionnelles, une position aussi défendue par la commissaire du gouvernement sur cette affaire[7]. Enfin la jurisprudence Hauchemaille du 25 juillet 2000 permet au Conseil constitutionnel de contrôler la recevabilité des décrets relatifs à la convocation et à l'organisation du référendum[8]. L’utilisation de l’article 11 pour une révision constitutionnelle pourrait donc être annulée avant même le référendum.
Entrée en vigueur
Sauf mention contraire, les dispositions des lois constitutionnelles entrent en vigueur à la date de leur promulgation.
Certaines lois constitutionnelles récentes ont toutefois prévu une date d'entrée en vigueur différée. Le contenu matériel de la Constitution, dans ces cas-là, change donc à des dates différentes de celles de la promulgation des lois constitutionnelles.
Par exemple, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 prévoit dans son article 46 que de nombreux articles de la réforme entrent en vigueur pour certains « le », pour d'autres « dans les conditions fixées par les lois et lois organiques nécessaires à leur application ». Par exemple la mise en œuvre du référendum d'initiative partagée (initiative parlementaire soutenue par une partie du corps électoral) prévue par la nouvelle rédaction de l'article 11 n’est possible que depuis le , date de l’entrée en vigueur de la loi organique du [LO 1].
La même révision constitutionnelle a prévu en son article 47 que certaines modifications des articles de la Constitution relatifs à l'Union européenne entreraient en vigueur au moment de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Celle-ci étant survenue le , le nouveau contenu de ces articles est entré en vigueur à cette date.
Élargissement des possibilités de recours au référendum, session parlementaire unique, aménagement des immunités parlementaires, abrogation des dispositions relatives à la Communauté française
Importante révision prévoyant notamment : impossibilité pour le président de la République d’exercer plus de deux mandats consécutifs, instauration du référendum d’initiative partagée et de la question prioritaire de constitutionnalité, information du Parlement par le Gouvernement en cas d’intervention des forces armées à l’étranger, changement dans le fonctionnement du Conseil économique, social et environnemental et du Conseil supérieur de la magistrature, création du défenseur des droits, ordre du jour des assemblées fixées par elles-mêmes, délibération du Parlement en séance publique sur le texte adopté par la commission saisie, possibilité pour le chef de l’état de s'exprimer devant le congrès…
↑Le traité établissant une Constitution pour l'Europe n’a pas été ratifié par la France après la victoire du non au référendum du 29 mai 2005. De ce fait, les révisions permettant la conformité au traité (article 3 de la loi constitutionnelle) ne sont jamais entrées en vigueur.
1962 : l'élection du président de la République au suffrage universel direct
Voulant passer outre l'opposition probable du Sénat, de Gaulle fait réviser la constitution en utilisant l'article 11 qui permet au président de soumettre à référendum « tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics ». La légalité du recours à cet article est très douteuse, car la Constitution prévoit les mécanismes de sa propre révision dans l'article 89 (un référendum est possible, mais après accord du Parlement). Elle suscite de vifs débats politiques et une controverse juridique, ainsi que la constitution d'un « cartel des non » inédit[9].
Néanmoins le prestige de De Gaulle, le fait que le « oui » l'emporta avec plus de 62 % des voix, et le fait que le Conseil constitutionnel refuse de contrôler la constitutionnalité des lois adoptées par référendum (car elles sont adoptées directement par le peuple), ont permis la mise en œuvre de cette réforme.
Dans la pratique, cette réforme n'a pas seulement changé le mode d'élection du président, elle a aussi considérablement augmenté ses pouvoirs en lui donnant une légitimité populaire que n'a pas le Premier ministre. On peut ainsi parler de seconde naissance de la Ve République.
1974 : la réforme du mode de saisine du Conseil Constitutionnel
Contexte
Le Conseil constitutionnel avait été pensé par Michel Debré et Charles de Gaulle comme une arme pointée contre le Parlement, dans le cadre d'un parlementarisme rationalisé. Ainsi, le rôle du Conseil était d'abord de faire respecter l'article 34 de la Constitution, en limitant les empiétements du Parlement et en faisant exister a contrario un exécutif fort et autonome. C'est ce pourquoi, lorsque le député Raymond Triboulet avait proposé d'ouvrir la saisine du Conseil aux oppositions parlementaires, Debré s'y était refusé, estimant que le Conseil devait se borner à faire respecter les équilibres institutionnels, sans s'ériger en protecteur des droits et libertés[10]. Cependant, la décision constitutionnelle no 71-44 DC du 16 juillet 1971 Liberté d'association a donné une nouvelle place au Conseil constitutionnel.
Révision
Dès lors, le Conseil constitutionnel a besoin d'une réforme. Valéry Giscard d'Estaing, nouvellement élu président de la République, souhaite élargir la saisine du Conseil constitutionnel aux parlementaires (60 députés ou 60 sénateurs), permettant ainsi à une opposition suffisamment importante de saisir le Conseil constitutionnel et ainsi de veiller au respect de la Constitution.
Il souhaite également que le Conseil constitutionnel puisse s'autosaisir lorsqu'une loi porte selon lui atteinte aux libertés publiques garanties par le Préambule ou le corps même de la Constitution[PLC 1], afin que chaque loi puisse effectivement être conforme à la Constitution. En effet, en l'absence d'une saisine parlementaire, par absence de volonté politique, une loi contraire à la Constitution peut entrer en vigueur. Cette disposition a cependant été supprimée par l'Assemblée nationale, notamment parce qu'elle risquait « de conduire presque inéluctablement le Conseil, lorsqu'il en fera usage, à préjuger la décision qu'il sera amené à prendre »[11].
Conséquences
La révision constitutionnelle de 1974, si elle a été qualifiée de « réformette » lors de son vote par le Congrès, a profondément bouleversé l'action politique française, en garantissant mieux la supériorité de la Constitution sur les lois. Il y eut 54 décisions constitutionnelles entre 1958 et 1975, alors qu'il y en a eu plus de 200 dans les 15 années suivantes, entre 1975 et 1990. Cependant, le problème de la saisine restait entier : il était toujours aujourd'hui possible de voir une loi contraire à la Constitution entrer en vigueur, avec les dérives que cela pouvait emporter. Une saisine indépendante du pouvoir législatif et exécutif paraissait indispensable, comme c'était le cas en Allemagne ou en Espagne. Depuis , la Question prioritaire de constitutionnalité a ouvert la saisine à tout justiciable, qui, à l'occasion d'une instance, remet en cause la constitutionnalité d'une disposition législative applicable. Cette saisine permet, après un filtre par la Cour suprême de la juridiction (Cour de cassation ou Conseil d'État), de demander au Conseil constitutionnel l'abrogation de cette disposition, si cette dernière est contraire à un droit ou une liberté que la Constitution garantit.
1992 : le traité de Maastricht
Cette révision avait pour but de rendre la Constitution compatible avec le traité sur l'Union européenne. Elle introduisait également, pour la première fois, un changement de l'article 2 qui disposait désormais que la langue de la République était le français.
C'est cet article qui est depuis systématiquement invoqué par les plus hautes juridictions de l'Etat pour refuser toute officialisation des langues de France ainsi que la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.
Le quinquennat est présenté pour la première fois le par Georges Pompidou. Le texte, adopté en termes identiques par l’Assemblée nationale et par le Sénat, n’a pas été soumis au Congrès pour approbation définitive[12], le président de la République n'ayant pas donné suite, en raison de l'impossibilité à réunir la majorité des trois cinquièmes nécessaires devant le Congrès et des résistances à son projet[13],[14].
Le texte de 2000 est la première révision constitutionnelle soumise au référendum en application de l’article 89 de la Constitution. Après 73 % de « oui » le , elle fut promulguée le 2 octobre. Elle a limité à cinq ans la durée du mandat présidentiel, mais ne s'est pas appliquée au président en exercice, Jacques Chirac, qui avait été élu en 1995 pour sept ans.
La principale motivation de cette révision était d'éviter la cohabitation, en faisant concorder la durée des mandats du président avec celui des députés. En effet, lorsque la majorité parlementaire n'était pas favorable au Président, celui-ci était contraint de nommer un Premier ministre hostile, car un ministre de son parti aurait toutes les chances de se faire renverser par l'Assemblée nationale.
En vue de la ratification ultérieure du Traité de Lisbonne, une révision du titre XV de la Constitution a été votée par le Congrès le , par 560 voix contre 181. La loi constitutionnelle a été promulguée le jour même[LC 23].
Les modifications apportées à la Constitution entérinent les transferts de souveraineté énumérés dans le traité de Lisbonne (par un renvoi direct à ce texte). Une trentaine de domaines régis jusqu'alors par la règle de l'unanimité comme la politique agricole commune ou la justice pénale, relèveront désormais d'un vote à la majorité qualifiée.
Sur le plan du fonctionnement institutionnel, les modifications traduisent en termes constitutionnels les prérogatives accordées aux parlements nationaux.
À compter de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le titre XV de la Constitution sera modifié selon l'article 2 de la loi constitutionnelle.
L’article 3 de la loi constitutionnelle procède à l’abrogation des dispositions de l’article 3 de la loi constitutionnelle no 2005-204 du qui avait modifié le titre XV de la Constitution « à compter de l’entrée en vigueur de ce traité » : ces dispositions constitutionnelles ne sont pas entrées en vigueur et sont désormais dépourvues d’objet.
Le président de la République ne peut dorénavant exercer plus de deux mandats consécutifs et ses « pleins pouvoirs » en période de crise donnent lieu à des avis du Conseil constitutionnel.
Enfin les rapports entre l’exécutif et le Parlement sont modifiés : les commissions parlementaires peuvent s’opposer à des nominations présidentielles à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ; le président peut s’exprimer devant le Congrès ; les parlementaires sont remplacés temporairement en cas d’acceptation par eux de fonctions gouvernementales (auparavant un ministre qui perdait son portefeuille ne pouvait plus retrouver son siège au Parlement) ; le gouvernement doit dorénavant informer le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger ; les assemblées fixent elles-mêmes leur ordre du jour. L’usage de l’engagement de responsabilité sur un texte est limité aux projets de loi de finances, de loi de financement de la sécurité sociale, et au maximum à un projet de loi supplémentaire par an.
Le , journée internationale des droits des femmes, la loi inscrivant la liberté de recourir à l'avortement dans la Constitution est officiellement promulguée, après avoir été adoptée par le Parlement réuni en Congrès[15]. La France devient ainsi le premier pays au monde à inscrire explicitement[18] dans sa Constitution la liberté des femmes à recourir à l'interruption volontaire de grossesse.
En 1969, Charles de Gaulle présente un projet sur la création des régions et la rénovation du Sénat. Utilisant l’article 11, un référendum est organisé le , le « non » l’emporte (52,4 % de non, Charles de Gaulle, prenant acte de ce refus des Français, démissionna immédiatement). La régionalisation s’est finalement opérée par la voie législative, notamment en 1972 et par une révision constitutionnelle de 2003 qui a constitutionnalisé la région[LC 17]. Le Sénat a gardé la même forme depuis 1958.
Interrompues
Date
Objet de la révision
Suites
1973
Durée du mandat présidentiel[PLC 3] (Repris dans la loi constitutionnelle du )
Adopté par les deux assemblées, sans suites
1974
Retour des anciens ministres à leur mandat de parlementaire[PLC 4] (Repris dans la loi constitutionnelle du )
Adopté par les deux assemblées, sans suites
1984
Extension du champ du référendum de l’article 11 pour l’étendre aux garanties fondamentales des libertés publiques[PLC 3]
Adopté par l’Assemblée nationale puis rejeté par le Sénat
1990
Exception d'inconstitutionnalité[PLC 5] (Repris dans la loi constitutionnelle du )
Adopté par l’Assemblée nationale puis modifié par le Sénat, conduisant à un arrêt de la discussion
1991
Extension du champ du référendum de l’article 11 pour l’étendre aux garanties fondamentales des libertés publiques[PLC 6]
Adopté par l’Assemblée nationale puis rejeté par le Sénat
1993
Équilibre Parlement-Exécutif[PLC 7] (Repris en partie dans les lois constitutionnelles du , du et du )
Non-cumul entre membre du gouvernement et fonction exécutive locale. Les présidents de la République ne deviennent plus membres du Conseil constitutionnel après leur mandat[PLC 13]
Non discuté au Parlement
2013
Les textes législatifs relatifs au droit du travail, à l’emploi ou à la formation professionnelle sont négociés au préalable avec les organisations syndicales représentatives[PLC 14].
Adopté par l’Assemblée nationale puis modifié à trois reprises par le Sénat et l’Assemblée nationale, conduisant à un arrêt de la discussion[25].
2024
Modification du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie[PLC 21].
Adopté par les deux assemblées, sans suites
En plus des textes effectivement déposés, plusieurs idées de modifications constitutionnelles sont avancées chaque année dans le débat politique[26].
Groupes de réflexion sur la modification de la Constitution
Plusieurs commissions ont été constituées officiellement afin de formuler des propositions de refonte des institutions :
Comité consultatif pour la révision de la Constitution, présidée par le professeur de droit public Georges Vedel en 1993. Il a inspiré la réforme du statut juridictionnel des ministres et, plus indirectement, celle du Conseil supérieur de la magistrature[PLC 7]. Ses travaux serviront à la réflexion et aux réformes qui suivront, notamment en 1995 et 2008.
Commission Truche, en 1997, présidée par Pierre Truche, premier président de la Cour de cassation, a formulé des propositions sur le statut du parquet et le respect de la présomption d’innocence. La réforme constitutionnelle envisagée porte sur la composition du CSM et la nomination des procureurs[27].
Commission Avril, présidée par le professeur de droit public Pierre Avril, en 2002, invitée à se prononcer sur le statut pénal du président de la République[28]. Ses travaux inspireront en partie la révision constitutionnelle du .
Commission Veil, présidée par l'ancienne ministre et magistrate Simone Veil, en 2008, invitée à se prononcer sur l'opportunité d'introduire de nouveaux droits dans le préambule de la constitution[30]. La commission n'envisage finalement qu'un seul ajout à l'article 1er de la Constitution pour y introduire une référence à un principe d'« égale dignité de chacun »[31].
Commission sur la rénovation et la déontologie de la vie publique, dite « commission Jospin », présidée par l'ancien Premier ministre Lionel Jospin, chargée en 2012 de proposer une réforme sur la vie publique. Elle formule 35 propositions : sur l'élection présidentielle, le Parlement, la limitation du cumul des mandats, le statut juridictionnel de l'exécutif et la prévention des conflits d'intérêts.
Groupe de travail sur l'avenir des institutions présidé par Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale. Cette commission commence ses travaux en et rassemble des parlementaires et des personnalités qualifiées. Son rapport rendu le formule dix-sept propositions dont le rétablissement du septennat présidentiel, la fusion du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental et le renforcement de l’indépendance de la Justice[32],[33].
Notes et références
Lois constitutionnelles citées
Ces lois peuvent être consultées sur le site Légifrance.
↑« Décision n° 92-312 DC du 02 septembre 1992 dite Maastricht II », Conseil constitutionnel (consulté le ) : « Considérant que sous réserve, d'une part, des limitations touchant aux périodes au cours desquelles une révision de la Constitution ne peut pas être engagée ou poursuivie, qui résultent des articles 7, 16 et 89, alinéa 4, du texte constitutionnel et, d'autre part, du respect des prescriptions du cinquième alinéa de l'article 89 en vertu desquelles "la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision", le pouvoir constituant est souverain ».
↑« Décision n° 62-20 DC du 06 novembre 1962 », Conseil constitutionnel (consulté le ) : « il résulte de l'esprit de la Constitution qui a fait du Conseil constitutionnel un organe régulateur de l'activité des pouvoirs publics que les lois que la Constitution a entendu viser dans son article 61 sont uniquement les lois votées par le Parlement et non point celles qui, adoptées par le Peuple à la suite d'un référendum, constituent l'expression directe de la souveraineté nationale. »
Autres références
↑Marc Guillaume, « Les révisions constitutionnelles : une constitution moins procédurale et plus fondamentale », Pouvoirs, no 166, (lire en ligne)
↑LOI constitutionnelle n° 2024-200 du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l'interruption volontaire de grossesse (1) (lire en ligne)
↑Miodrag Jovicic, « La nouvelle Constitution yougoslave de 1974. Ses particularités et caractéristiques en tant qu'acte juridique général suprême. », Revue internationale de droit comparé, vol. 26, no 4, , p. 793-794 (DOI10.3406/ridc.1974.15623, lire en ligne, consulté le )
↑Malgré la Yougoslavie en 1974 qui garantissait la liberté de « décider librement de la naissance de ses enfants » (mais pas explicitement un droit à l'avortement même si cela se traduisait par un droit à l'avortement jusqu'à 10 semaines de grossesse)[16],[17].
Pierre Avril, Jean Gicquel et Jean-Éric Gicquel, Droit parlementaire, Issy-les-Moulineaux, LGDJ, Lextenso éditions, coll. « Domat / Droit public », , 398 p. (ISBN978-2-275-04151-3)
P. Gaïa, R. Ghevontian, F. Mélin-Soucramanien, E. Oliva et A. Roux, Les Grandes décisions du Conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, , 656 p. (ISBN978-2-247-12981-2)