Sarah Bernhardt, née le à Paris et morte le à Paris 17e[2], est une comédienne, peintre et sculptricefrançaise. Elle est considérée comme une des plus importantes actrices françaises du XIXe et du début du XXe siècle.
Appelée par Victor Hugo « la Voix d'or », mais aussi par d'autres « la Divine » ou encore « l'Impératrice du théâtre », elle est considérée comme une des plus grandes tragédiennes françaises du XIXe siècle. Première « étoile » internationale, elle est la première comédienne à avoir fait des tournées triomphales sur les cinq continents, Jean Cocteau inventant pour elle l'expression de « monstre sacré ».
Biographie
Naissance
Rosine Bernardt, future Sarah Bernhardt, est née à Paris le , au no 5, place de l’École-de-Médecine (voir la photo)[3][réf. non conforme].
Son père Édouard Viel (1819-1857) est un avoué du Havre. Bel homme, grand séducteur, il est emprisonné en 1855 pour malversations financières, et décède peu après à Pise[8].
Sarah n’ayant jamais dévoilé son nom, on a longtemps ignoré qui était son père[9]. Des journalistes contemporains de Sarah connaissaient son secret et faisaient des allusions dans leurs articles. L’ascendance havraise était souvent évoquée. On parlait aussi du « beau V. ». Ces quelques indices ont permis d’établir en 2022 et de manière définitive les origines normandes de l’actrice[8].
En 1914, en vue d’obtenir la Légion d'honneur et prouver la nationalité française de l'actrice, un acte de naissance rétrospectif est établi par décision de justice le 23 janvier 1914[11]. sur la base d'un certificat de baptême produit par Sarah, acte dont on sait aujourd’hui qu’il comportait plusieurs erreurs.
Par chance, à la mort d’Édouard, Julie, espérant un legs pour sa fille, a demandé une copie conforme de l'extrait de naissance (datant de 1857, soit avant l'incendie de 1871). Ce document retrouvé en même temps que l’identité du père établit de manière définitive la naissance de l'actrice au [8].
De même, le lieu de sa naissance n'était pas plus sûrement établi : une plaque mentionnant sa naissance (le ) est apposée au 5, rue de l'École-de-Médecine (ancien 11e), on évoqua également la rue Saint-Honoré — au 32 ou au 265 — ou encore le 22, rue de La Michodière[10]. La copie de l’acte de naissance indique qu'elle est née chez la sage-femme Charlotte Clémence Collé, au 5 de la place de l'École-de-Médecine, disparue vers la fin du XIXe siècle lors de la construction de l'École pratique de médecine[8].
Enfance
Sarah Bernhardt a au moins trois sœurs et souffre en particulier longtemps de la préférence de sa mère pour sa jeune sœur Jeanne-Rosine, également comédienne. Délaissée par Youle qui choisit la vie mondaine à Paris, elle passe une petite enfance solitaire chez une nourrice à Quimperlé où elle ne parle que le breton. Puis en 1853, elle est envoyée en pension au couvent du Grandchamp à Versailles, où elle étudie jusqu'en 1858[12]. Elle y devient mystiquecatholique[13]. Elle y joue son premier rôle, un ange dans un spectacle religieux[14]. Elle y organise sa conversion à la religion catholique, reçoit le baptême chrétien en 1857 et envisage de devenir religieuse[b].
Pendant son séjour au couvent, elle est atteinte d'une pleurésie qui la laisse entre la vie et la mort pendant 23 jours selon ses Mémoires. Cette épreuve lui donne le goût du macabre, tant sur la scène que dans la vie privée, d'où sa propension à l'âge adulte à s'entourer de memento mori qui nourrissent ses méditations morbides[15]. Elle rentre en juin 1859 en convalescence à Paris, chez sa mère qui engage une gouvernante, Mlle de Brabender, pour parfaire l'éducation de Sarah. L'amant de Youle, le duc de Morny, suggère lors d'un conseil de famille, de mettre Sarah au Conservatoire malgré la volonté de l'adolescente de retourner au couvent et d'y prononcer ses vœux. Le soir même de ce conseil, son parrain et sa mère l'envoient assister à une pièce au Théâtre-Français dans la loge ducale. Elle découvre sa vocation de comédienne à cette occasion[16].
C'est alors que son nom aurait été francisé en « Bernard ». Elle quitte vers 14 ans la vie monacale et passe le concours du Conservatoire où elle est reçue. « Tout le monde m'avait donné des conseils. Personne ne m'avait donné un conseil. On n'avait pas songé à me prendre un professeur pour me préparer[17]. »
Elle prend aussi des leçons d'escrime dont elle tirera profit dans ses rôles masculins comme Hamlet[18].
À cette époque, la police des mœurs compte Sarah parmi 415 « dames galantes » soupçonnées de prostitution clandestine[21]. Mère célibataire, elle devient en effet demi-mondaine et se laisse entretenir par des clients généreux pour pouvoir élever son fils Maurice mais aussi pour se payer les accessoires de théâtre, les tenues de ville ou les tenues de soirée pour les pièces contemporaines qui restent à cette époque à la charge des acteurs[22].
Elle signe un contrat avec l'Odéon en 1866[23]. Elle y est révélée en 1869 en jouant Le Passant de François Coppée, où elle joue un travesti[24], le troubadour Zanetto[25]. En 1870, pendant le siège de Paris, elle transforme le théâtre en hôpital militaire et y soigne le futur maréchal Foch qu'elle retrouvera quarante-cinq ans plus tard sur le front de la Meuse, pendant la Première Guerre mondiale[26]. Elle triomphe dans le rôle de la Reine de Ruy Blas en 1872, ce qui la fait surnommer la « Voix d'or » par l'auteur de la pièce, Victor Hugo, à l'occasion d'un banquet organisé pour la centième représentation[27]. Ce succès lui vaut d'être rappelée par la Comédie-Française dont elle est nommée sociétaire en 1875 ; elle y joue dans Phèdre en 1874 et dans Hernani en 1877[28].
Avec le succès, les surnoms élogieux se multiplieront : « la Divine »[29], l'« Impératrice du théâtre »[30]…
Consécration et indépendance
En 1880, Sarah Bernhardt subit son premier échec avec la Comédie française, dans L'Aventurière d'Augier, une pièce médiocre qu'elle ne veut pas jouer. Elle décide alors de remettre sa démission avec l'institution le , avec copie de sa lettre au Gaulois et au Figaro[31]. Elle doit payer cent mille francs-or en dommages et intérêts pour rupture abusive de contrat avec le « Français ». Après cet acte prémédité[c], elle crée sa propre compagnie avec laquelle elle part en tournée dans le monde entier jusqu'en 1917, notamment en Angleterre et aux États-Unis où elle acquiert fortune et notoriété[32]. Première « star » internationale, elle est ainsi la première comédienne à avoir fait des tournées triomphales sur les cinq continents, Jean Cocteau inventant pour elle l'expression de « monstre sacré »[30]. Dès 1881, à l'occasion d'une tournée de Bernhardt en Russie, Anton Tchekhov, alors chroniqueur au journal moscoviteLe Spectateur[33], décrit malicieusement « celle qui a visité les deux pôles, qui de sa traîne a balayé de long en large les cinq continents, qui a traversé les océans, qui plus d'une fois s'est élevée jusqu'aux cieux »[34], brocarde l'hystérie des journalistes « qui ne boivent plus, ne mangent plus mais courent » après celle qui est devenue « une idée fixe [sic] »[35].
Elle interprète à plusieurs reprises des rôles d'homme (entre autres Hamlet et Pelléas), inspirant à Edmond Rostand sa pièce L'Aiglon en 1900[36]. Elle se produit à Londres, à Copenhague, aux États-Unis (1880-1881) où elle affrète un train Pullman pour sa troupe et ses 8 tonnes de malles, au Pérou (1886) où tous les billets pour ses représentations se vendent en 48 heures, au Chili (1886), dont elle critique les habitants[37], et en Russie, notamment au théâtre Michel de Saint-Pétersbourg (en 1881, 1892 et 1908). Son lyrisme et sa diction emphatique enthousiasment tous les publics. Afin de promouvoir son spectacle, elle rencontre Thomas Edison à New York et y enregistre sur cylindre une lecture de Phèdre[28]. Elle devient l'une des très rares artistes françaises à avoir son étoile sur le Hollywood Walk of Fame à Los Angeles.
Invitée en Australie en février 1891, elle se produit à Melbourne notamment, fait la connaissance d'Adrien Loir, neveu de Pasteur, avec lequel elle a sans doute une liaison[38].
En 1899, elle prend la direction du théâtre des Nations qu'elle rebaptise « théâtre Sarah-Bernhardt » et où elle constitue une nouvelle troupe avec son partenaire de jeu de Max et Marguerite Moreno qui partagent avec elle une vision « corporelle » du jeu d'acteur.
En opposition à son fils, elle apporte son soutien à Émile Zola au moment de l’affaireDreyfus[39], elle soutient Louise Michel et prend position contre la peine de mort.
Ayant compris l'importance de la réclame, elle met en scène chaque minute de sa vie et n'hésite pas à associer son nom à la promotion des produits de consommation. Son style et sa silhouette inspirent la mode, les arts décoratifs mais aussi l’esthétique de l’Art nouveau. Elle fait elle-même appel au peintre Alfons Mucha pour dessiner ses affiches à partir de . Ces six années de collaboration donnent un second souffle à sa carrière. Tuberculeuse comme sa sœur Régina qui en meurt en décembre 1874, elle développe une certain goût pour le macabre en s'installant régulièrement dans un cercueil en bois de rose, capitonné de satin blanc où elle aime se reposer ou y répéter ses rôles, selon ses Mémoires. Devant le scandale suscité, elle s'y fait photographier par un opérateur du studio Melandri pour en vendre des photos et cartes postales qui font le tour du monde, participant ainsi à la construction de sa légende[42]. C'est dans ce même cercueil qui la suit dans toutes ses résidences, qu'elle est inhumée en 1923[43].
En 1905, lors d'une tournée au Canada, le Premier ministreWilfrid Laurier l'accueille à Québec ; mais l’archevêqueLouis-Nazaire Bégin, détestant le théâtre et reprochant à l'actrice un jeu du corps nouveau pouvant être qualifié d'érotique, demande à ses paroissiens de boycotter la représentation et l’actrice, habituée aux foules, se produit devant une salle en partie vide[44].
Après avoir joué dans plus de 120 spectacles, Sarah Bernhardt devient actrice de cinéma. Son premier film est Le Duel d'Hamlet réalisé en 1900. C'est un des premiers essais de cinéma parlant avec le procédé du Phono-Cinéma-Théâtre, où un phonographe à cylindre synchronisait plus ou moins la voix de l'actrice aux images projetées[45]. Elle tournera d'autres films — muets — dont deux œuvres autobiographiques, la dernière étant Sarah Bernhardt à Belle-Île en 1912, qui décrit sa vie quotidienne[46].
Sarah Bernhardt est amputée de la jambe droite en 1915[48], à l'âge de 70 ans, en raison d'une tuberculose osseuse du genou. Les premiers symptômes remontent à 1887, lorsqu’elle se blesse au genou sur le pont d'un bateau qui la ramène d'une tournée aux Amériques[48]. Cette première luxation, non soignée, s’aggrave en 1887, lors des sauts répétés du parapet dans le final de La Tosca, la comédienne ayant chuté à de nombreuses reprises sur les genoux[49], puis en 1890 à la suite d'une nouvelle blessure contractée lors d'une représentation du Procès de Jeanne d'Arc au théâtre de la Porte-Saint-Martin[réf. nécessaire]. En 1902, lors d’une tournée, un professeur de Berlin diagnostique une tuberculose ostéo-articulaire et prescrit une immobilisation de six mois que l’actrice ne peut se résoudre à suivre[50]. Elle se contente de séances d'infiltrations et, en 1914, d'une cure à Dax, d'ailleurs sans effet[51].
En , craignant que Sarah Bernhardt ne soit prise en otage, lors d’une éventuelle avancée allemande sur Paris, le ministère de la Guerre conseille à l’actrice de s’éloigner de la capitale. Henri Cain, un de ses proches dont la femme, Julia Guiraudon, est fille d’un ostréiculteur de Biganos, lui recommande de séjourner sur le bassin d’Arcachon, où lui et son épouse louent une villa à Andernos-les-Bains[48]. Elle arrête son choix sur la villa « Eurêka », où elle s'installe de à [d].
Plâtré durant six mois, son genou développe une gangrène[52]. Son médecin et ancien amant, Samuel Pozzi, que Sarah surnomme « Docteur Dieu »[53], ne peut se résoudre à pratiquer lui-même l'opération et sollicite le concours du professeur Jean-Henri Maurice Denucé, désormais chirurgien à Bordeaux[54]. L'actrice est amputée au-dessus du genou le à la clinique Saint-Augustin de Bordeaux[e]. Sarah revient en convalescence à Andernos en [55]. Le membre amputé, longtemps conservé à titre de curiosité dans du formol à l'institut médico-légal de Bordeaux, semble avoir été perdu[56]. Elle participe à une manifestation patriotique le où elle lit deux poèmes puis quitte définitivement Andernos en [48]. Elle va à Reims, « la ville où il faut être vu », le [57] et joue le rôle d'une infirmière devant la cathédrale martyre[58].
Cela ne l'empêche pas de continuer à jouer assise — elle refuse de porter une jambe en bois ou une prothèse en celluloïd —, ni de rendre visite aux poilus au front en chaise à porteurs, lui valant le surnom de « Mère La Chaise »[59]. Elle ne s'épanche jamais sur son infirmité, sauf pour rire : « Je fais la pintade ! »[60]. Son refus des faux-semblants n'a pas été jusqu'à lui faire négliger la chirurgie esthétique. En 1912, elle demande au chirurgien américain Charles Miller un lifting, technique alors débutante, dont les résultats seront corrigés par Suzanne Noël[61].
Alors qu'elle est en train de tourner un film pour Sacha Guitry, La Voyante, elle meurt « d'une insuffisance rénale aiguë »[62] le [2], à son domicile au 56, boulevard Pereire à Paris, en présence de son fils. Ses obsèques religieuses ont lieu en l'église Saint-François de Sales Paris, 17ème le jeudi 29 mars dans la chapelle paroissiale rue Ampère. Elle est enterrée à Paris au cimetière du Père-Lachaise (44e division)[63].
L'artiste
Style dramatique
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La performance théâtrale de Sarah Bernhardt, que ses contemporains acclamèrent à l'égale de celle de Mounet-Sully, est, comme cette dernière, emphatique tant dans la pantomime que dans la déclamation. Les modulations de la voix s'éloignent délibérément du naturel[64] ; les émotions sont rendues, tant par le geste que par l'intonation, plus grand que nature[65]. Ce style hérité de la déclamation baroque se démode avant la fin de sa carrière ; Alfred Kerr remarque « tout ce qui sort de sa bouche est faux ; sinon, tout est parfait[66] ». Les critiques modernes qui écoutent ses enregistrements de Phèdre au laboratoireThomas Edison en 1903[g] sont souvent déçus[67].
Peinture et sculpture
Vers 1874, alors qu'elle est une comédienne au talent reconnu, mais manquant d'emplois qui l'intéressent, Sarah Bernhardt apprend le modelage[68], puis la peinture. Elle fréquente l'Académie Julian à Paris et présente au Salon de 1880 La Jeune Fille et la Mort, reçu « moins comme un résultat qu'une promesse[69] ».
Les détails de la vie privée de Sarah Bernhardt sont souvent incertains. Quand elle expliquait : « Je suis si mince, si maigre, que quand il pleut je passe entre les gouttes », Alexandre Dumas fils — qui la détestait — ajoutait dans une discussion avec le journaliste Louis Ganderax : « Elle est si menteuse qu’elle est peut-être grasse[71]. »
En 1882, elle se marie à Londres avec un acteur grec, Aristides Damala(en), mais celui-ci est dépendant de la morphine et leur relation ne dure guère. Elle restera cependant son épouse légitime jusqu'à la mort de l'acteur, en 1889 à l'âge de 34 ans. Mais elle perd sa nationalité française en épousant un étranger. Donc en 1916, elle fait une demande de réintégration dans la nationalité française[81].
Elle était amie du poète Robert de Montesquiou qui lui avait dédié un poème (inédit). Ce poème manuscrit faisait partie de sa bibliothèque vendue en 1923[82].
Dédaignant les stations balnéaires à la mode et désireuse d'établir sa retraite en un lieu qui lui soit particulier, à l'écart du monde, Sarah Bernhardt choisit de séjourner face à l'Océan, sur une pointe rocheuse déchiquetée et venteuse, éloignée du chef-lieu d'une île bretonne, Belle-île, elle-même relativement difficile d'accès et alors inconnue du grand tourisme. C'est son portraitiste attitré, Georges Clairin[83], qui la lui fait découvrir en 1893. Elle s'y installe chaque été avec ses animaux exotiques et sa petite cour de commensaux — qu'elle appelle indistinctement « sa ménagerie » — dans un fortin militaire désaffecté qu'elle acquiert en novembre 1894 au lieu-dit « La pointe des Poulains »[84]. À côté de ce fortin elle fait bâtir, décorer et meubler la villa Lysiane (le prénom de sa petite-fille) et la villa Les Cinq Parties du monde, travaux importants qui lui coûtent plus d'un million de francs-or, somme considérable pour l'époque. Quand le manoir de Penhoët, trop proche de son fortin à son goût, est à vendre, elle l'achète et s'installe dans cette résidence qui a disparu lors des bombardements de la Seconde Guerre mondiale. Pour s'y rendre elle prend le train de Paris jusqu'à Vannes, où elle donne à l'occasion quelques représentations, avant d'embarquer pour "son" île où elle fait grand effet aux habitants. En 1922, infirme, malade et désargentée, elle vend ses propriétés belle-îloises. Là, un musée lui est consacré depuis 2007[85].
Selon son passeport de 1886, elle mesurait 1,54 m[86].
Personnalité
Sa devise était « Quand même » en référence à son audace et à son mépris des conventions. Alors qu'elle est attaquée par des détracteurs sur ses origines, après la défaite de 1871, elle déclare : « Je suis Française, Monsieur, absolument Française. [...] Toute ma famille est originaire de la Hollande. Amsterdam est le berceau de mes modestes aïeux. Si j'ai de l'accent, Monsieur (et je le regrette beaucoup), mon accent est cosmopolite, et non tudesque. Je suis une fille de la grande race juive, et mon langage un peu rude se ressent de nos pérégrinations forcées »[87].
Elle a en partie inspiré à Marcel Proust — sans doute avec les comédiennes Rachel et Réjane — le personnage de l'actrice « la Berma » dans À la recherche du temps perdu[88]. Proust la désignait parfois dans sa correspondance par « Haras », son prénom à l'envers[89].
« Madame Sarah jouait un grand rôle dans notre existence. Après notre père et notre mère, c'était assurément la personne la plus importante du monde à nos yeux. […] Que l'on décrive avec exactitude et drôlerie — ainsi que Jules Renard l'a fait dans son admirable Journal — sa maison, ses repas, ses accueils surprenants, ses lubies, ses excentricités, ses injustices, ses mensonges extraordinaires, certes […] mais qu'on veuille la comparer à d'autres actrices, qu'on la discute ou qu'on la blâme, cela ne m'est pas seulement odieux : il m'est impossible de le supporter. […] Ils croient qu'elle était une actrice de son époque. […] Ils ne devinent donc pas que si elle revenait, elle serait de leur époque »
« Il faut haïr très peu, car c'est très fatigant. Il faut mépriser beaucoup, pardonner souvent, mais ne jamais oublier. Le pardon ne peut entrainer l'oubli ; pour moi, du moins[91]. »
On lui attribue aussi ce mot :
« Sarah Bernhardt, à qui une jeune comédienne a déclaré qu'elle avait déjà joué plusieurs fois et qu'elle n'avait même plus de trac, aurait alors répondu : « Ne vous en faites pas, le trac, cela viendra avec le talent ». »
Elle aurait déclaré avoir gagné au cours de sa carrière quelque 45 millions de francs, soit 185 millions d'euros.
Dans son testament, elle déclare léguer « tout ce que j'ai immeubles, bijoux, reconnaissances au Mont-de-Piété, meubles, bibelots, toute ma bibliothèque, mon argenterie, mes robes, mon linge, tout ce qui se trouve dans mon hôtel bl Péreire […] à mon fils Maurice Bernhardt. […] Enfin il n'est pas un brin de fil m'appartenant qui ne soit à mon fils, auquel je donne tout tout[93]. »
Sarah Bernhardt, Ma double vie : mémoires de Sarah Bernhardt, Paris, Fasquelle, (lire en ligne) - rééd. Phébus, coll. « Libretto », Paris, 2002, (ISBN978-2859408671)
La Jeune Fille et la Mort, Salon de 1880, localisation inconnue.
Musée Sarah-Bernhardt à Belle-île-en-Mer
À la pointe des Poulains (Belle-Île-en-Mer), le fort, la villa Lysiane et la villa Les Cinq Parties du monde sont désormais accessibles[Depuis quand ?] au public comme Espace muséographique Sarah-Bernhardt. Les demeures de la tragédienne sont réaménagées dans leur décor du début du XXe siècle.
Demeures de Sarah à Paris
Les informations suivantes proviennent principalement de : Danièle Prévost, « Sarah Bernhardt chez elle à Paris », Bulletin de la Société historique et archéologique des 8e et 17e arrondissements, no 151, , p. 52 et de Sarah Bernhardt chez elle[98].
Chez sa mère, au 265, rue Saint-Honoré (selon ses Mémoires).
En 1870, elle loue un logement neuf au propriétaire architecte Jules Bon, au 4, rue de Rome.
En 1875-1876, elle achète deux terrains rue Fortuny et y fait bâtir un hôtel particulier, de style Louis XIII, par l'architecte Félix Escalier. Ruinée, elle est obligée de le vendre aux enchères en 1885. L'hôtel est démoli, mais le musée Carnavalet en conserve deux dessins le représentant[99].
Au 15, rue Saint-Georges, elle loue un hôtel meublé de 1885 à 1886 à Madame Hesse, avant de repartir en tournée.
À partir de 1887, elle s'installe dans un hôtel au 56, boulevard Pereire, appartenant au directeur de théâtre Louis Cantin, moyennant un loyer annuel de 11 000 francs. C'est ici qu'elle meurt en 1923. L'hôtel fut démoli par la suite.
Postérité
Le musée Carnavalet conserve une médaille en or à l'effigie de Victor Hugo, exécutée par le graveur Jules-Clément Chaplain et qui fut offerte à Sarah Bernhardt en 1911 pour la centième représentation de Lucrèce Borgia (ND 1080).
Le théâtre Sarah-Bernhardt, qu'elle a dirigé sous ce nom, plus tard connu sous le nom de théâtre de la Ville, reprend le nom de l'actrice en 2023[106].
Pour son centenaire, un timbre a été émis, avec retard, le [108],[109]. Elle est alors en France la première actrice honorée de la sorte[110]. Existent aussi un timbre de Cuba (1989) et un (du sesquicentenaire) de Monaco (1994).
Culture
Le personnage de Sarah Bernhardt apparaît dans de nombreuses œuvres de fiction de la culture populaire contemporaine.
Amelia, film d'Ana Carolina Suares, Brésil, 1998, avec Béatrice Agenin dans le rôle de Sarah Bernhardt (inédit en France)[111].
Sarah Bernhardt est le principal protagoniste de la pièce de John Murrell(en)Memoirs, traduite en français par Georges Wilson en 1982 sous le titre Sarah et le Cri de la langouste et par Éric-Emmanuel Schmitt en 2002 sous le titre Sarah ;
Sarah Bernhardt est le personnage principal de l'album Sarah Bernhardt (1982) de la série de bandes dessinées Lucky Luke ;
Elle est le personnage principal du téléfilm Sarah Bernhardt, une étoile en plein jour, en 2008, réalisé par Laurent Jaoui et interprété par Ludmila Mikaël ;
Sarah Bernhardt est le personnage principal de l'album de bande dessinée Divine, vie(s) de Sarah Bernhardt (2020) de Marie Avril et Eddy Simon aux éditions Futuropolis ;
Le film Hibernatus la cite : le personnage qui joue le professeur Loriebat se réveille et le médecin à son chevet lui dit : « Nous sommes en 1905, Sarah Bernhardt a eu hier soir un triomphe dans L'Aiglon et M. Loubet est toujours président ».
Dans le film Fitzcarraldo de Werner Herzog (1982), Jean-Claude Dreyfus qui interprète un chanteur d'opéra, est crédité en tant que Sarah Bernhardt au générique[112],[113] malgré la différence de carrure. Sarah Bernhardt mesurait 1m54 (selon son passeport)[114].
Un des personnages de la pièce de théâtre Les Vibrants de Aïda Asgharzadeh est Sarah Bernhardt[116].
Dans la série Guyane, la mine mythique porte son nom[117].
Elle apparaît également en tant que personnage important dans le film d'animation Dilili à Paris, dans lequel elle aide son amie, la petite Dilili à atteindre des objectifs.
Sarah Bernhardt est également présente dans le jeu vidéo The Invisible Hours.
↑Orthographié sans « h », selon les actes de naissance de Sarah et de ses sœurs.
↑Elle ne reniera cependant jamais ses origines, comme l'indique le choix de son nom de scène et ses prises de position. Cf. lettre à M. Jouvin citée dans Jules Huret, Sarah Bernhardt, F. Juven, (lire en ligne), p. 30.
↑Sarah Bernhardt signe en effet le contrat pour la tournée aux États-Unis avec son manager Edward Jarrett et l'imprésario américain Henry Abbey, dès le mois de mai 1879. Cf Dupont-Nivet, op. cit., p. 101
↑Située au 245, avenue de la République, la villa a été détruite en 1978 pour faire place à l'ensemble immobilier « Les Vacances » ; la mention de la plaque qui y est apposée, « Ici se trouvait la villa Eurêka dans laquelle Sarah Bernhardt résida de 1915 à 1917 », est de fait erronée.[réf. nécessaire].
↑La prétendue « jambe de Sarah Bernhardt », que le directeur du cirque Barnum de San Francisco aurait proposé d'acquérir pour 100 000 livres pour la montrer dans les foires, aurait été retrouvée en 2007 dans le laboratoire d'anatomopathologie de la faculté de médecine de Bordeaux où elle était conservée dans un bocal de formol. Cf. Laurence Liban, « Qui a volé la jambe de Sarah Bernhard? », L'Express, .
↑En 1913, Sarah Bernhardt achète le rocher de Basse-Hiot, au large de son fortin de la pointe des Poulains. Elle veut y faire édifier sa sépulture, comme Chateaubriand au Grand Bé. Pour des raisons sans doute légales ou pratiques, son dernier souhait n'est pas respecté et elle est enterrée dans une tombe du Père-Lachaise. Le monument en granit, en forme de dolmen percé de quatre arceaux, abrite le caveau familial en ciment. Cf France Raimbault, Le Père-Lachaise. Guide du flâneur, A. Sutton, , p. 73
↑Sur ce point le doute subsiste : pour les organisateurs de l'exposition Sarah Bernhardt : et la femme créa la star, la relation amoureuse serait « probable »[76], pour le magazine Diacritik, ce serait une « relation d'amour ou d'amitié, dont on ne sait hélas pas grand chose »[77] mais Tristan Cordeil[78], émet de forts doutes sur l'homosexualité de Louise Abbéma[79] et parle, concernant la relation entre Louise Abbéma et Sarah Bernhardt, de « belle amitié »[80].
↑Elle a expérimenté cette épreuve durant l'agonie de sa propre sœur Régina qui habite chez elle depuis longtemps. Cf Claudette Joannis, op. cit., p. 45
↑ ab et cActe no 779 (vue 28/31), registre des décès de l'année 1923 pour le 17e arrondissement, cote 17D 225, État civil numérisé de la ville de Paris.
↑ Registre paroissial de la cathédrale Saint-Louis, Versailles.
« L’an 1856, le 21 mai a été baptisée par nous soussigné chapelain de la communauté de Grandchamp dûment autorisé par Mgr l’Évêque de Versailles, dans la chapelle de la dite communauté, Sara, Marie, Henriette, née à Paris 12e arrondissement le 25 septembre 1844, fille de M. Édouard Bernhardt, demeurant actuellement au Havre, rue des Arcades no 2, et de Mme Judith Van Hard demeurant à Paris rue St Honoré 265. Le parrain a été M. Régis Lavolée, rue de la Chaussée d’Antin 65 à Paris, représenté par M. Nicolas Murcier, rue Saint- Honoré 24 à Versailles et la marraine Mme Anna Van Hard veuve Bruck, tante de l’enfant. »
La place de l’école de médecine n’était pas dans le 12e mais dans le 11e arrondissement ancien (actuel 6e). Le prénom du père est exact, mais le nom Bernhardt est celui de Julie. Van Hard est le nom de la mère de Julie. L’adresse d’Edouard est exacte, elle correspond à son étude d’avoué, celle de la mère est exacte. La date de naissance est fausse. Le parrain (que Sarah détestait) ne s’est pas déplacé. Et la tante est allemande.
↑ a et bHenry Gidel, Sarah Bernhardt : biographie, Flammarion, , p. 10.
↑« Ayant toujours conservé un léger accent hollandais, elle prononçait son propre nom à l’allemand : Youlie. Et trouvant cela moins banal que Julie, presque tous ses amis l’appelaient Youle. » Louis Verneuil, La vie merveilleuse de Sarah Bernhardt, , p. 38.
↑ abc et dHélène-Claire Richard (en collaboration avec Danièle Prevost), « Le père de Sarah Bernhardt : une énigme enfin résolue », Les Cahiers de la société historique des VIIIe et XVIIe arrondissements, Soc. historique des 8e et 17e arrondissements, no 161, , p. 1-28 (lire en ligne).
↑(en) Robert Gottlieb, Sarah : The Life of Sarah Bernhardt, Yale University Press, , p. 2.
↑ a et bRobert Gottlieb, The Life of Sarah Bernhardt, op. cit., p. 1.
↑ a et bFiche de Sarah Bernhardt, registre des dames galantes, Paris SAM Série BB, registre no 1, citée dans Gabrielle Houbre, Le Livre des courtisanes : archives secrètes de la police des mœurs, 1861-1876, Paris, Taillandier, (cf. notice de Florence Rochefort dans Clio no 26, 2007) et Gabrielle Houbre, « Courtisanes sous surveillance », dans Bruno Fuligni, Dans les archives secrètes de la police : Quatre siècles d'histoire, de crimes et de faits divers, Paris, L'iconoclaste, (cf. notice de Jean-Marc Leclerc, Le Figaro, 3 décembre 2008).
↑Claudette Joannis, Sarah Bernhardt : reine de l'attitude et princesse des gestes, J'ai lu, , p. 80
↑(en) Éric Salmon, Bernhardt and the Theatre of Her Time, Greenwood, , p. 60 et Béatrix Dussane, Reines de théâtre : 1633-1941, H. Lardanchet, , p. 177.
↑ a et bLouis Forestier, « Sarah Bernhardt, « tout entière au théâtre attachée » », revue de l'AMOPA, no 188, , p. 31-34.
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Marie-Louise Barberot, Sarah Bernhardt, Côté jardin, Éditions Gasgogne, 2013. (Mme Barberot était une arrière-petite-fille de l'oncle Edouard (du Chili) de Sarah).