Emmanuel Radnitsky naît dans le sud de Philadelphie, en Pennsylvanie, le 27 août 1890. « Manny » est l'aîné d’une famille juiveashkénaze d’origine russe. Ses parents sont Melach « Max » Radnitzky, un tailleur, et Manya « Minnie » Radnitzky (née Lourie ou Luria), couturière. Il a un frère, Sam, et deux sœurs, Dorothy « Dora » et Essie (ou Elsie), la plus jeune née en 1897, peu de temps après leur installation dans le quartier de Williamsburg à Brooklyn, à New York. Il sera l'oncle de la photographe (en) Naomi Savage[7].
Au début de 1912, la famille Radnitzky change son nom de famille en Ray, sous l’initiative du frère de Man Ray, qui a choisi le nom de famille en réaction à l'antisémitisme fréquent à l'époque. En même temps, Manny devient « Man ». Plus tard, il refusera même de reconnaître avoir eu un autre nom que celui de « Man Ray »[8].
Le père Radnitzky enrôle ses enfants pour l'aider dans son atelier.
Man Ray fréquente la Modern School du Ferrer Center qui fonctionne à Manhattan puis Harlem, selon les principes de l'éducateur libertaire catalan Francisco Ferrer. Cette formation anarchiste est déterminante puisqu'elle le libère très tôt du respect des valeurs établies, désacralise à ses yeux les techniques d'expression traditionnelles et l'encourage à ne suivre que sa propre nécessité individuelle dans toutes ses innovations.
Avec son ami proche Marcel Duchamp, ils forment la branche américaine du mouvement dada. Après quelques expériences artistiques infructueuses, notamment une publication sur le dada new-yorkais en 1920, Man Ray conclut que « Dada ne peut pas vivre à New York ».
Il rencontre également le couturierPaul Poiret. Il réalise de nombreuses photographies de mode qui sont publiées dans les magazines et contribuent à le faire connaître. À son grand regret, il n'aura jamais l'occasion de faire le portrait du couturier. Dans son livre de souvenirs, il confie qu'à la mort de Paul Poiret, il a envoyé à un journal une photographie du médecin personnel du couturier comme étant un portrait de Poiret et qu'elle a été publiée comme telle.
En 1929, Man Ray commence à travailler avec Lee Miller qui, en plus d'être sa muse et son assistante, devient sa maîtresse. Jusqu'en 1932, ils entretiennent cette relation créative, développant ensemble le potentiel esthétique de la solarisation[13],[10].
En 1931, il réalise une œuvre à vocation publicitaire intitulée Électricité. Il s'agit d'un album composé d'un ensemble de photographies commandé par la Compagnie Parisienne d'Électricité. Cet ensemble de rayogrammes a pour objectif la promotion de l'électricité à usage domestique, en tant que symbole de la modernité[14].
Fin 1934, au bal nègre de la rue Blomet, il fait la connaissance de la jeune guadeloupéenne Adrienne Fidelin[16],[17]. Il a 46 ans et elle presque 20. Elle devient sa compagne, son modèle et sa muse. Inséparables, Man Ray l'introduit dans son cercle d'amis artistes et écrivains, adeptes du surréalisme, mouvement alors en vogue. Dans son autobiographie, Man Ray décrit le groupe constitué par Pablo Picasso, Dora Maar, Paul Éluard et Nusch Éluard, Max Ernst et Leonora Carrington, ainsi que Lee Miller et Roland Penrose, André Breton[16]. C'est ainsi le début d'une histoire d'amour de cinq années étroitement mêlée à une vie artistique intense, au sein de la communauté surréaliste[18]. Adrienne Fidelin prend alors le nom d'Ady Fidelin[16]. C'est l'une des membres les plus fascinants de l’avant-garde internationale[19].
Hollywood
En 1940, après la défaite de la France, et inquiété du fait de ses origines juives, Man Ray parvient à rejoindre Lisbonne et s'embarque pour les États-Unis en compagnie de Salvador et Gala Dalí ainsi que du cinéaste René Clair. Après quelques jours passés à New York, il gagne la côte ouest avec le projet de quitter le pays pour Tahiti où il resterait quelques années.
Arrivé à Hollywood, il reçoit des propositions d'exposition et rencontre dans un night-club sa deuxième femme, la danseuse et mannequin d'origine roumaine (en)Juliet Browner[18],[20] avec laquelle il se marie en 1946[21], et décide de se remettre à peindre. Installé à Los Angeles, il peint notamment des sculptures mathématiques qu'il avait découvertes et photographiées à l'institut Henri Poincaré dans les années 1930, donnant à chacune d'elles le titre d'une œuvre de Shakespeare[22].
Il meurt à Paris le et est inhumé au cimetière du Montparnasse (7e division). Sa tombe porte l'épitaphe : « Unconcerned, but not indifferent » (« Détaché, mais pas indifférent »).
Entre le 18 et le , la tombe de Man Ray est profanée à cinq reprises [26]. Le médaillon représentant le couple est brisé et la stèle de son épouse Juliet Man Ray née Browner (1911-1991) est détruite.
African sculpture on lying woman, 1930. Il s'agit en réalité d'un portrait de Simone Breton de 1927[54].
Échiquier surréaliste, 1934, photomontage de vingt portraits d'artistes surréalistes, alternés sur fonds blancs et fonds noir : De haut en bas, et de g. à dr.: Breton, Ernst, Dali, Arp, Tanguy, Char, Crevel, Eluard, De Chirico, Giacometti, Tzara, Picasso, Magritte, Brauner, Péret, Rosey, Miro, Messens, Hugnet, Man Ray. Publié dans Georges Hugnet, Petite anthologie poétique du surréalisme, Jeanne Bucher, [55],[56].
Self Portrait, Londres, André Deutsch, 1963 ; Autoportrait, traduit de l'américain par Anne Guérin, Paris, Robert Laffont, 1964 ; réédité chez Seghers, 1986, disponible sur Internet Archive
↑Son pseudonyme emprunte trois lettres à son prénom et trois à son nom, et signifie littéralement « homme rayon » (de lumière), ce qui doit être entendu comme « l'homme qui écrit avec la lumière », c'est-à-dire le sens étymologique du mot « photographe ».
↑Guy Duplat, « Couples d'artistes : Lee Miller et Man Ray », La Libre Belgique, .
↑(en) Jeff L. Rosenheim, « Electricité », sur MetMuseum (consulté le ).
↑Agnès De La Beaumell, Alberto Giacometti, le dessin à l'œuvre, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 2001, 256 p. (ISBN9782844260109).
↑ ab et cWendy A Grossman et Sala Patterson, « Adrienne Fidelin », sur academia.edu, in Le modèle noir, Musée d’Orsay/Flammarion, Paris, pages 306-311, (consulté le ).
↑(en-US) Peter B. Flint, « Juliet Man Ray, 79, The Artist's Model And Muse, Is Dead », The New York Times, (ISSN0362-4331, lire en ligne, consulté le )
Michel Butor, L'Atelier de Man Ray, photographies de Maxime Godard, Paris, Bernard Dumerchez, 2005.
Noriko Fuku et John P. Jacob, préface de Marc Restellini, Atelier Man Ray. Unconcerned but not indifferent, [catalogue de l'exposition], Éd. Pinacothèque de Paris, 2008.
Alain Jouffroy, « Man Ray (1890-1976) », in Encyclopædia Universalis (en ligne sur Universalis-edu.com).
Ouvrage Collectif, Catalogue de l'exposition Man Ray, le beau temps, musée des Cultures et du Paysage, Hyères 2023, Paris, Éditions courtes et longues.