Ciné-clubLe ciné-club (de l'élément ciné- (de cinéma), et du mot club) est un club d'amateurs de cinéma. L'on peut y étudier la technique et l'histoire du cinéma dans le cadre de la projection d'un film[1]. Sa spécificité est de réunir des membres ayant des intérêts communs, desquels dépendront la programmation du ciné-club et les sujets de discussion qui y auront lieu. L'organisation d'une séance de projection suit généralement le modèle "présentation-projection-discussion"[2]. HistoireAvant la Première Guerre mondialeLe cinéma comme outil d'enseignementDès la création du cinéma, celui-ci est pensé comme un potentiel outil d'enseignement à l'instar du kinétoscope et de la lanterne magique déjà utilisés à ces fins. Mouvements catholiques et laïques , qui y voient "un formidable moyen d'éducation, d'influence et de propagande"[3] s'en emparent. Les catholiques "sont sans doute les tout premiers à comprendre l’utilisation possible du cinéma à des fins de propaganda fide"[4] qu'ils mettent en œuvre grâce à la revue Le Fascinateur (créée en 1903). Dans cette logique, des projections ont lieu dans les églises avant que la Sacrée congrégation ne les interdise en 1912[5]. Ainsi, l’adoption du cinéma comme moyen éducatif et d’évangélisation ne fait pas l’unanimité. Pour Christian-Marc Bosséno le retard des laïques sur l’adoption du cinéma comme moyen d'éducation est bien visible[4]. Les premiers ciné-clubsSelon Laurent Mannoni, le mot ciné-club apparaît pour la première fois avec la création du « Ciné-Club » d’Edmond Benoît-Lévy au cinéma Omnia Pathé (Paris) en [6]. Situé au 5 boulevard Montmartre à Paris, il a pour but de conserver et mettre à la disposition de ses membres tous les documents et productions cinématographiques existants. Il est également pourvu d'une salle de projection[7]. Il faut pourtant attendre la création en du Ciné-Club parisien du boulevard Pereire par Louis Delluc[8] pour que les premiers Ciné-clubs se développent. Dans l'entre-deux-guerresOn observe une accélération de l'usage du cinéma comme outil d'enseignement dans la période de l'Entre-deux-guerres. Une "concurrence" entre réseaux laïques et catholiquesL'offensive des milieux catholiquesC’est la fin des années 1920 qui voit "s’accomplir une véritable révolution des mentalités catholiques face au cinéma, qui devient une arme pour l’Église de France, bien décidée à se saisir des moyens de communication modernes pour reconquérir le terrain perdu par la déchristianisation"[9]. C'est dans ce contexte qu'est créée la Centrale catholique du cinéma (et son organe de diffusion : Dossiers du cinéma) par le chanoine Joseph Reymond en 1927 qui se dote de trois missions principales :
Ces actions répondent à trois constats :
Parallèlement, cinq réseaux de salles de projection catholiques sont mis en place sur le territoire français. Ces cinémas ont une programmation assez "éclectique" afin de fidéliser le public, mais toujours dans un enjeu apostolique et avec un cadre moral et religieux précis dans lequel la censure jouent un rôle considérable[9]. Le nombre de ces salles est estimé à environ 3000 au sortir de la Seconde Guerre mondiale[10]. Cette volonté des catholiques de faire du cinéma un "instrument de reconquête apostolique" pousse à la création de nombreux organismes de contrôle dont l'Office catholique international du cinéma (Ocic) créé en mai 1928. Pour ses fondateurs "cette organisation devait déployer une stratégie politique internationale de lutte contre la sécularisation de la société et contrarier au moyen du cinéma les idéologies franc-maçonne, socialiste, communiste, bolchevique, etc."[11]. Ces différentes actions légitiment l'usage du cinéma débouchant en 1935 à la publication de l'encyclique Vigilanti cura (es) du pape Pie XI qui positionne pour de bon l’Église romaine en faveur de son utilisation. La réaction des laïquesAprès la guerre, les laïques développent leurs réseaux de projections cinématographiques. Dès lors, instituteurs et prêtres constituent les véritables "chevilles ouvrières de ce phénomène socioculturel d’éducation par l’image"[12]. Les réseaux laïques se développent à partir des réseaux scolaires avec le cinéma scolaire. Sont ainsi diffusés des films servant des objectifs pédagogiques bien précis dans l’instruction donnée en classe : géographie, l’histoire, sciences, etc. Des structures se mettent en place via la création d'office régionaux grandement aidés par les politiques publiques entre 1924 et 1933. Faisant face à l'implantation catholique dans certaines régions - notamment dans l'Ouest - et en pleine bataille scolaire, ces offices se répartissent inéquitablement sur le territoire métropolitain[13]. Cependant, face à l'appropriation du médium par les organisations catholiques qui participe à la "véritable fièvre obsidionale qui s’empare parfois des laïques"[14] - et face à l’inaction de l’état[15] - centraliser l'action paraît inévitable. Ainsi est créée le 20 juin 1929 la Fédération nationale des offices du cinéma éducateur (FNOCE) puis, en janvier 1932, son organe de diffusion géré en collaboration avec la cinémathèque de la ville de Paris : Cinédocument. En 1933, la FNOCE adhère à la Ligue de l'enseignement et devient l'Union française des offices du cinéma éducateur laïque (Ufocel). Divers terrains de lutteUn des objectifs fixés par les réseaux laïques est justement de contrer l’influence de l’Église – et en particulier "de concurrencer le réseau des salles paroissiales de la Centrale catholique"[16]. Dans la période de l’entre-deux-guerres, « un des objectifs majeurs du monde de l’éducation populaire laïque consiste à promouvoir l’école publique au moyen des activités postscolaires et populaires programmées le jeudi après-midi, le dimanche et les jours fériés afin de concurrencer la catéchèse et les loisirs dirigés par l’éducation populaire catholique »[17]. L'enjeu est d'éduquer à la citoyenneté et à l’hygiène sociale à travers le cinéma éducateur c'est-à-dire des films comme Âmes d'enfants (Jean Benoit-Lévy, 1928)[18] ou le Voile sacrée (Jean Benoit-Lévy, 1930)[19]. Ces œuvres - en plus de faire une « propagande par omission » qui dénient le rôle social de l’Église - peuvent être qualifiés d’anticléricales, dans le sens où elles « promeuvent la culture scientifique et combattent les idées reçues, sur lesquelles plane le fantôme de l’obscurantisme clérical »[17]. Une autre bataille concerne la reconnaissance des formats de pellicules. Après le passage au parlant, un rééquipement en 35 mm coûterait trop chère. Les laïques proposent comme format intermédiaire le 16 mm tandis que les catholiques favorisent le 17,5 mm produit par Pathé (format très utilisé dans les réseaux de salles catholiques équipées en Pathé-baby et Pathé-rural). La rivalité entre les deux mouvements s'observe également directement sur le terrain où les coups bas entre instituteurs et prêtres sont parfois rapportés dans les revues :
L'approche cinéphileSi l'on en croit Valérie Vignaux, la première occurrence de l’expression « ciné-club » est issue du Journal du Ciné-club créé par Louis Delluc et Georges Denola en janvier 1920[21]. Par la suite, le terme gagne en notoriété avec le ciné-club lancé le 12 juin 1920 au cinéma La Pépinière par Louis Delluc puis avec Le Club des amis du septième art (Casa) fondé par Riccioto Canudo le 18 avril 1921. Ces rassemblements prennent dans un premier temps la forme de réunions d’intellectuels européens, d’artistes d’avant-garde et de corporatistes qui s’ancrent avant tout dans un projet de reconnaissance du cinéma face notamment aux nombreux discours cinéphobes d’intellectuels ; à l’instar de Georges Duhamel le qualifiant de « divertissement d’ilote » en 1937[22]. Puis, peu à peu, le modèle ciné-club émerge avec l’organisation de discussions avec le public et se dirige timidement vers des projets plus orientés vers l'éducation artistique[23], comme le proposent le Club du faubourg ou la section cinéma de la Fédération française des artistes. Cependant, c'est très probablement le Ciné-club Spartacus, créé par Léon Moussinac et très proche du PCF, qui est "probablement la première tentative réussie de faire du cinéma un outil d'éducation populaire orienté vers les questions esthétiques"[3]. À la fin des années 1920, de nombreux ciné-clubs émergent parmi lesquels le Film-club, le Club de l'écran, le Groupement des spectateurs d'avant-garde ou la Ligue noir et blanc[23]. Ainsi est créé en novembre 1929 la Fédération des ciné-clubs de langue française présidée par Germaine Dulac et regroupant aussi bien des ciné-clubs parisiens que de province (Montpellier, Nice, Marseille, Lyon, Reims, etc.). Pendant l'OccupationAvec la Seconde Guerre mondiale et le régime de Vichy, les initiatives concernant le cinéma, mises sous la tutelle des Allemands, connaissent une période difficile. La Ligue de l’enseignement et ses offices du cinéma éducateur – dont la tendance politique de gauche est affirmée et dont de nombreux membres sont issus de la franc-maçonnerie — ferment leurs portes le 23 juillet 1942. Malgré une plus grande bienveillance de l'État français envers les œuvres catholiques, l’Église est peu à peu exclue des réseaux de cinéma[5]. Concernant le mouvement cinéphile, il existe des ciné-clubs clandestins, en particulier celui animé par André Bazin[24]. À la LibérationRenaissance des mouvements d'éducation populaireAu sortir de la guerre, les mouvements d’éducation populaire sont à terre mais, marqué par les désastres de l'autoritarisme et par la résiliation des populations face aux politiques discriminatoire, un véritable engouement participent à leur renaissance. Cet enthousiasme s'observe avec la renaissant de la Ligue de l'enseignement dans les territoires libérés d'Algérie puis en France métropolitaine, mais aussi, et surtout, par les créations de Peuple et culture et de Travail et culture. De plus, le gouvernement triparti mis en place - marquant "l’entrée massive et résolue dans la vie politique des catholiques et des communistes" - favorise cette nouvelle vague d'éducation populaire en instaurant une Direction de la culture populaire et des mouvements de jeunesse au sein du ministère de l'Éducation nationale. Dirigée par Jean Guéhenno, elle devient en 1946 le sous-secrétariat d'État à la Jeunesse et aux sports. Engouement pour le cinémaAu même moment, le cinéma connaît un important regain d'intérêt. Le contrôle de la production par l’occupant, la censure mise en place, l’interdiction des films américains mais aussi, plus globalement, la "pénurie de distractions dans l’immédiate après-guerre (et surtout les distractions gratuites)"[24], provoquent un enthousiasme pour le septième art et sa diffusion associative. Pour Léo Souillés-Debats, l’après-guerre est une période où s’effectue un changement de paradigme dans l'éducation cinématographique. Ainsi, on passe de l'"éducation par le cinéma" à l'"éducation au cinéma"[2]. Pour Vivien Soldé, cependant, on ne peut que difficilement séparer "éducation au" et "éducation par" le cinéma. Il analyse cette période comme étant celle de la création du "champ de l'éducation populaire cinématographique" né de la collision entre le "champ cinéphile" (celui notamment des premiers ciné-clubs) et le "champ de l'éducation populaire"[3]. Reprise de l'éducation cinématographiqueL’Union française des œuvres du cinéma éducateur laïque (Ufocel) et ses offices régionaux des œuvres laïques par l’image et le son (Oroleis) rouvrent petit à petit leurs portes. La fédération peut compter sur ses anciens réseaux et sur son ancrage dans le cinéma scolaire qui lui permet de reprendre ses activités principalement autour des cinémas scolaire et éducateur avec l’ambition de s’intéresser au cinéma culturel[3]. Elle publie la revue Ufocel informations. Quant à la Fédération française des ciné-clubs (FFCC) créée en mars 1945, elle semble s'inscrire dans la continuité de la Fédération des ciné-clubs de langue française[23]. Tout du moins, la nouvelle FFCC - qui naît "sous l'égide communiste"[25] - est un projet qui paraît dater de l'Occupation :
Malgré le soutien de la revue l'Écran français, la FFCC ne tarde pas à se doter de son propre bulletin Ciné-club qui devient Cinéma en 1954. Une autre association se créée très tôt après la Libération : Film et famille. Officiellement constituée en novembre 1944[3], elle s’inscrit dans la continuité de la revue clandestine Caméra puis Feuillets du cinéma dirigée par Roger Delacroix et diffusée depuis février 1942. Cette organisation confessionnelle réunit des catholiques et des protestants laïcs et ecclésiastiques qui appellent à un « redressement artistique » et à un « assainissement moral » du cinéma[3],[5]. Elle publie une revue nommée Film et famille. Le « morcellement du mouvement ciné-club »Selon Vivien Soldé, la période d'accalmie entre les mouvements confessionnels et les mouvements laïques, due aux amitiés dressées durant la Résistance, ne dure pas. Les débuts de la Guerre froide entraîne un refroidissement des relations puis la multiplication des associations et fédérations (Léo Souillés-Debats parle d’un « morcellement du mouvement ciné-club »[2]) malgré la création en 1947 de la Fédération internationale des ciné-clubs (Ficc) initiée par la FFCC[3]. La Fédération loisirs et culture cinématographique (Flecc) est une des premières fédérations créées par des dissidents de la FFCC[3]. Issue d'un embryon de service cinématographique de la Jeunesse ouvrière chrétienne (Joc) et après concertation avec l'Association catholique de la jeunesse française (ACJF), elle est mise en place le 3 juillet 1946 par André Guillou, secrétaire général de la Jeunesse indépendante chrétienne (Jic), Gérard Marroncle, jéciste socialiste toulousain et Marcel Roy, jociste socialiste bordelais[5],[2]. Se limitant à la publication de fiches filmographiques et de notes d'informations dans un premier temps, elle devient une fédération lors de l'adoption du décret sur le cinéma non commercial et officialise au même moment sa revue Téléciné[3]. Même si elle est catholique, la Flecc se distingue cependant clairement de la ligne politique et morale défendu par la CCR et Film et famille en s'ancrant dans les valeurs des mouvements de jeunesse ce qui, pour Mélisande Leventopoulos, la catégorise du côté des « mouvements cinéphiles éclairés »[5] à l'instar de l'hebdomadaire dominicain Radio, cinéma, télévision. En 1950, un autre organisme est créé par des dissidents de la FFCC : la Fédération centrale des ciné-clubs (FCCC). Elle édite une revue nommée Études cinématographiques. En 1948, une antenne de la FFCC voit le jour comme une fédération à part entière : la Fédération française des ciné-clubs de jeunes (FFCCJ). Dans les mêmes années naît une fédération protestante par le biais de la Société centrale d'évangélisation par le cinéma (Sercinev) créée en 1948 par le pasteur évangéliste Henri de Tienda et sa femme Madeleine (alias Mady) de Tienda. Mais ce n'est que le 25 octobre 1950 que la fédération prend le nom de Film et vie. Domiciliée au 47 rue de Clichy, elle se situe dans l'Hôtel de la Fédération protestante de France au côté de diverses sociétés évangéliques[3]. Le décret du cinéma non commercialLes premières lois fiscales concernant le cinéma scolaire et éducateur datent de l’entre-deux-guerres où l’Ufocel réussit « à obtenir les premières exonérations fiscales »[26]. Mais en 1948, aucun statut spécifique n’encadre réellement le secteur du cinéma non commercial. À la suite des nombreuses plaintes d’exploitants à propos de la concurrence déloyale des ciné-clubs, le CNC est encouragé à assurer « le développement d’un secteur non commercial du cinématographe » comme le stipule l’article 2 de la loi du 25 octobre 1946[27] et travaille avec des représentants des fédérations à la mise en place d’un véritable statut du cinéma non commercial qui doit convenir à la fois aux professionnels ainsi qu’aux différentes fédérations qu’elles soient laïques ou confessionnelles. Un contexte de tensionLe 6 janvier 1948, une loi pose « une première reconnaissance d’une exploitation non commerciale » mais dans laquelle les ciné-clubs ne sont pas encore inclus. Ainsi de nombreux problèmes se posent aux ciné-clubs quant à la légalité de leurs activités, notamment en rapport à la taxation des spectacles. Ils sont notamment accusés par certains exploitants de concurrence déloyale. Cette situation débouche sur deux procès. Le premier connaît un grand retentissement, c’est celui de Jean Michel pour le Ciné-club de Valence, mis en accusation le 10 janvier 1949. Pour Roxane Hamery, ce procès « de par sa longueur et son retentissement, [...] est certainement le plus emblématique des intérêts contradictoires que le cinéma représente pour l’État à cette période »[27]. Le second procès, bien que se déroulant presque en même temps, passe relativement inaperçu dans le monde des ciné-clubs ; c’est celui de Film et famille, mis en accusation le 10 mai 1949. Les deux associations sont attaquées par les Contributions indirectes qui représentent le ministère des Finances et qui leur reprochent le non-paiement des taxes sur les spectacles. Si Jean Michel semble avoir été « dénoncé par un exploitant local »[2], les militants de Film et famille apparemment exaspérés des réclamations des taxes se sont mis d’accord avec l’administration pour le déroulement d’un « procès-type » visant à « sauvegarder les droits de chacun »[3]. Malgré la loi de 1948, c’est au nom de la circulaire de 1929, de Raymond Poincaré que sont menés ces procédures judiciaires. Une circulaire qui relève d’une autre conception de la culture que celle d’après-guerre, où « seules seraient considérées comme culturelles “les séances à caractère strictement (sic) éducatif, comprenant des films scientifiques, agricoles ou documentaires destinés à instruire et non à distraire” »[28]. Ainsi, lors de la clôture du procès de Jean Michel, cette circulaire est jugée dépassée et il est relaxé le 2 décembre 1949. Cependant, cette affaire ne s’arrête pas là puisque les Contributions indirectes vont utiliser les différents recours à leur disposition jusqu’au 24 mars 1955 où la Cour d’appel de Chambéry rend un verdict définitif[29]. Film et famille, quant à elle, est finalement relaxée le 10 mai 1950[3]. Le contenu du décretLe 21 septembre 1949, le décret n°49-1275 établissant le statut du cinéma non commercial est adopté. Il est signé par le Président du conseil Henri Queuille, le ministre de l'Éducation nationale Yvon Delbos, par le ministre de l'Industrie et du commerce Robert Lacoste et par le secrétaire d'état à l'enseignement technique, à la jeunesse et aux sports André Morice. Les ciné-clubs doivent désormais répondre à plusieurs exigences :
Malgré l'adoption du décret sur le cinéma non commercial, les tensions entre exploitants et ciné-clubs ne diminuent pas. D’après Roxane Hamery, deux textes apaisent les conflits. Dans un premier temps, la Décision réglementaire n°33 du 24 avril 1954 qui oblige les ciné-clubs à projeter des films de plus de quatre ans d’ancienneté et leur interdit l’accès au matériel publicitaire des distributeurs. Et dans un second temps, le décret 55-469 du 30 avril 1955 portant réforme de l’impôt sur les spectacles qui insiste sur le caractère culturel des séances[27]. En parallèle, la création de l’Association française des cinémas d’art et essai (Afcae) en 1955 permet aux exploitants de s’établir sur les terrains des ciné-clubs. De même, le développement de la télévision est désormais vu comme une menace plus grande que le cinéma non commercial. Avec l'adoption de ce décret, les demandes d'habilitation explosent tandis que l'État souhaiterait avoir le moins d'interlocuteurs possible. Pour Vivien Soldé, le décret a pour effet de redéfinir le champ de l’éducation populaire cinématographique forçant à la reconstitution des réseaux autour des quelques fédérations habilitées dont les identités (notamment confessionnelles et laïques) sont fondamentales. De leur côté, les bureaux de la Jeunesse et des Sports dépêche un inspecteur, Pierre Arents, afin d'évaluer le sérieux des fédérations et les possibilités de fusion entre structures similaires[3]. Jeunesse et Sports tente ainsi de résorber le conflit avec les exploitants en mettant en valeur les « grandes fédérations » jugées plus sérieuses. Ainsi, quelques structures n'obtiendront pas l'habilitation :
Ainsi, le 29 septembre 1953, seules la FFCC, l’Ufocel, Film et famille, Film et vie, la Flecc et la CRCC sont définitivement habilitées. D'autres sont habilitées provisoirement en attendant une potentielle fusion ou une plus implantation plus importante. Finalement, le cinéma non commercial compte 12 fédérations en 1954 (cf. Institutions). Pour certaines structures, une échappatoire au décret paraît se trouver dans les autorisations spéciales. Celles-ci sont attribuées au compte-goutte mais permettent à quelques organisations ne correspondant pas aux exigences du décret de tout de même projeter légalement des films. Elles concernent notamment l'Association française pour l'accroissement de la productivité, le Touring club de France, Tourisme et travail, la Fédération nationale des caisses chirurgicales mutualistes et la Mondial films documentaires[3]. Les années 1950-1960 : L'Âge d'or des ciné-clubsLa mise en place complexe de la législation sur le cinéma non commercial n’empêche pas la forte hausse de la fréquentation des ciné-clubs. De 1956 à 1959, le nombre de spectateurs dans les séances organisées par les fédérations habilitées à diffuser la culture par le film passe de 4 781 677 à 6 597 135 sur l’ensemble du pays représentant 1,77% de la totalité de l’exploitation. À ce moment, la France connaît un « deuxième record historique de fréquentation enregistré en 1957 » avec plus de 350 millions d’entrées avant de connaître une chute impressionnante de fréquentation qui ne se stabilise qu’aux années 1970-1980 autour de 170-180 millions d’entrées[30]. Un « No man's land juridique »À la suite d'un recours porté par certains représentants de la profession auprès du Conseil d’État, le décret de 1949 est annulé le 17 juillet 1957. Ce recours visait en premier lieu la loi n° 55-469 du 4 août 1956 qui « permet désormais à toute association proposant des projections dont le prix des places est inférieur à 50 francs d’être exemptée de la taxe sur les spectacles ». Ainsi, les fédérations habilitées à diffuser la culture par le film entrent dans une période de « no man’s land juridique » qui ne prend fin qu’en 1964[2]. Depuis les années 1970 : Le déclin des ciné-clubsInstitutionsFédérations habilitées à diffuser la culture par le film[31]
Ciné-clubsCiné-clubs historiquesRecensement des ciné-clubsDans les annexes de sa thèse[31], Vivien Soldé met en avant une proposition de recensement participatif de l'ensemble des ciné-clubs relevant du décret de 1949. De ce travail a été établit deux cartes interactives, une présentant les ciné-clubs de l'Ufoleis et une seconde présentant les ciné-clubs des autres fédérations. Fédération internationaleAutres structures
Périodiques[31]Revues des fédérationsUnion française des œuvres du cinéma éducateur laïque (Ufoleis)
Fédération française des ciné-clubs (FFCC)
Fédération loisirs et culture cinématographique (Flecc)
Film et vie
Film et famille
Fédération centrale des ciné-clubs (FCCC)
Fédération Jean Vigo
PersonnalitésLes personnalités suivantes sont citées ici car elles ont participé activement la création ou à la vie de ciné-clubs ou parce qu'il s'agit de réalisateurs dont les œuvres sont typiquement projetées dans les ciné-clubs.
En milieu publicLe concept du ciné-club a évolué et est de plus en plus intégré à des activités socio-culturelles variées, ce afin de faire se rencontrer différentes disciplines dont le cinéma et de la cinéphilie. On en trouve notamment des adaptations du concept de ciné-club :
FonctionnementLe ciné-club est organisé autour d'une structure juridique régie par des règles de fonctionnement découlant directement de la constitution et de différents textes de loi relatifs au pays où a été créé le club. Tous les ciné-clubs disposent en outre d'un mode de fonctionnement interne qui leur est propre ; certains créent leurs propres méthodes de gestion du ciné-club, aux niveaux interne et public. Mais ces différents modes de fonctionnement se recoupent toujours en un point : l'objectif majeur des ciné-clubs, la diffusion et la promotion de films. Structure juridiqueSi le mode de fonctionnement juridique des ciné-clubs le plus courant est le système associatif, il existe néanmoins d'autres types de ciné-clubs, parfois simplement rattachés à une structure plus importante, ou ayant nécessité la création d'une structure différente étant donné le statut particulier de certains clubs. Il existe également des ciné-clubs privés, "underground", estudiantins, politiques, etc. Rapport au publicLa plupart des ciné-clubs organisent des séances précédées d'une présentation ou d'un historique (portant sur le réalisateur ou sur le film lui-même). Par ailleurs, l'activité de ciné-club conduit presque toujours à faire suivre la projection d'un débat avec le public. C'est par exemple le cas de l'association loi de 1901 Cinéma sans Frontières, association niçoise installée au cinéma Mercury. L'objet de cette association est de présenter, tous les vendredis soir, des films d'horizons aussi divers que possible. Elle a présenté à ce jour () des films de 42 pays différents. Activité publiqueLa principale activité d'un ciné-club est la projection de films. Celle-ci est souvent précédée d'une présentation de l'auteur, du contexte du tournage, et/ou suivie par un débat, en général animé par un intervenant du milieu cinématographique (artiste, critique, technicien) ou membre du club associatif. Néanmoins, il arrive que certains ciné-clubs ne projettent pas que des films, pouvant passer à la vidéo si le besoin s'en fait sentir, ou même à des techniques de projection autres, plus anciennes notamment. Par ailleurs, ces séances peuvent ne pas se limiter à des projections et faire partager à leur public des évènements singuliers. La forme et le fond de ces projections sont intimement liées la programmation du club. Programmation interneLa programmation des ciné-clubs respecte dans la plupart des cas une ligne directrice correspondant à la visée pédagogique de l'association. Elle est fréquemment répartie sous forme de cycles, lesquels peuvent être accompagnés de séances spéciales. Définies d'abord par les membres fondateurs du ciné-club en fonction de critères de sélection tant pratiques (moyens du ciné-club) que théoriques (idéologie du ciné-club), la programmation et sa ligne directrice peuvent évoluer en fonction de la demande du public, ou des moyens et idéologies qui y sont liés. Théorie généraleChaque ciné-club possède donc sa propre programmation, généralement très différente de celle des cinémas plus grand public. Une distinction majeure réside justement en la présence d'une ligne directrice dépendant directement d'une théorie partagée par le(s) membre(s) fondateur(s), et qui constitue la raison d'être du ciné-club. Ces théories, souvent fondées par les réflexions de cinéastes (Jean-Luc Godard, pour son discours dans Histoire(s) du cinéma, mais aussi Louis Delluc, Abel Gance, etc.) ou théoriciens du cinéma[44] (ainsi, André Bazin, Jean Douchet créèrent leur propre Ciné-club), ne sont pourtant pas indispensables au bon fonctionnement de l'association. Car si la théorie du ciné-club sert souvent de point de départ pour les discussions et débats suivant la projection des films, les animateurs et intervenants pouvant être les théoriciens eux-mêmes (membres permanents ou invités occasionnels), il est aussi possible que certains membres ayant préparé une présentation du film projeté, ou connaissant particulièrement l'œuvre ou le sujet abordé, prennent la parole afin de mener le débat. CyclesDans le cadre d'une fidélisation du public à l'activité cinématographique que représente le ciné-club, les membres de ce dernier établissent différents cycles destinés à entrevoir les différentes facettes d'un genre, d'un courant, d'un personnage, d'un métier ou encore d'une technique spécifiques du cinéma. Ressortent essentiellement deux types de cycles distincts :
Le sujet des cycles, tant permanents que périodiques, peut être très varié. À titre d'exemples de cycles destinés à illustrer ces sujets potentiels :
Ces sujets peuvent être combinés entre eux de telle sorte qu'en peuvent ressortir des cycles aux sujets particulièrement originaux et extrêmement précis ; cela pourrait donner par exemple un cycle à fréquence bimensuelle sur les influences de la peinture impressionniste française sur l'image-cristal[45] dans le cinéma européen des années trente. Toutefois ce cas extrême est exceptionnel et les cycles habituels sont plus portés sur des intégrales de personnages ou thèmes importants du cinéma. Ainsi, la cinémathèque française aura présenté en 2007 l'œuvre intégrale de Sacha Guitry[46] ou le cycle Fantômes de midi, présentant des films traitant plus ou moins directement des fantômes[47]. Séances spécialesAfin de toujours donner plus d'entrain au ciné-club, peuvent y être organisées des séances dites spéciales, reproduites régulièrement ou à titre exceptionnel. Parmi les séances spéciales fréquentes, on trouvera notamment les séances concernant un public particulier comme les séances jeune public[48]. Organisation d'évènements et collaborationMais l'activité des ciné-clubs ne s'arrête pas à la programmation interne, même de séances spéciales. En effet, les ciné-clubs occupent une place souvent importante dans divers domaines : très présents au niveau de l'organisation d'évènements locaux ou régionaux, ils sont aussi là pour la collaboration aux festivals, ainsi qu'au niveau de divers programmes d'éducation à l'image. Ces engagements divers ne sont pas le fruit du hasard : ils correspondent à la politique de chacun d'entre ces clubs. Ciné-club dans l'artCiné-club au cinémaUne projection relevant du cinéma scolaire catholique est visible dans le film Au revoir les enfants de Louis Malle (1987). Notes et références
AnnexesArticles connexes
BibliographieOuvrages
Articles
Chapitres d'ouvrage
Thèses et mémoires
Rapports
Liens externes
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